Les Européens entament lundi à Bruxelles une nouvelle série de réunions dans l'espoir de reprendre la maîtrise de leurs frontières extérieures et d'accélérer le retour de migrants illégaux, face à un afflux qui ne donne aucun signe d'essoufflement.

Les ministres de l'Intérieur de l'Union européenne devaient se retrouver dans l'après-midi à Bruxelles, deux jours avant un sommet de chefs d'État et de gouvernement européens et africains à Malte où l'accent sera mis sur l'accélération des retours de migrants économiques vers l'Afrique.

Des milliers de migrants continuent de faire marche vers les portes de l'UE, par bateau, entre les côtes turques et les îles grecques de la mer Égée, puis en traversier jusqu'au continent, mais aussi à pied, en train, en bus, pour traverser les Balkans vers le nord de l'Europe.

Le flux avait été interrompu quelques jours en raison de la grève des traversiers grecs entre les îles égéennes et le continent. Mais depuis sa levée vendredi, quelque 15 000 migrants ont été acheminés vers le port du Pirée, continuant immédiatement leur route vers le nord.

Lundi matin, à Eidomeni sur la frontière macédonienne, une centaine d'autobus formaient une longue file. «Des cars ne cessent d'arriver chargés de réfugiés qui avaient été bloqués ces derniers jours sur les îles grecques par la grève des bateaux. La situation n'est pas facile, mais gérable», a affirmé à l'AFP Alexandre Voulgaris, un représentant sur place du Haut commissariat de l'ONU pour les réfugiés. Il estime que 10 000 migrants devraient passer la frontière dans la journée.

Plus de 750 000 réfugiés et migrants sont déjà arrivés depuis le début de l'année en Europe, dont 140 000 ont fait la dangereuse traversée de la Méditerranée entre la Libye et l'Italie, selon l'ONU, qui table sur l'arrivée en Europe de 600 000 personnes au cours des quatre prochains mois, par la Turquie.

À Bruxelles, les ministres de l'Intérieur de l'UE doivent faire le point sur le soutien financier promis aux pays des Balkans, qui craignent une catastrophe humanitaire avec l'arrivée de l'hiver et se sont engagés, avec la Grèce, à créer 100 000 places d'accueil.

Certains pays pourraient aussi se faire sermonner pour leur peu d'entrain à participer à la répartition de 160 000 réfugiés arrivés en Grèce et en Italie, une mesure de solidarité controversée arrachée malgré l'opposition de pays comme la Hongrie ou la Slovaquie.

À Lesbos, les arrivées continuent

Divisés sur ce sujet, les 28 sont en revanche sur la même longueur d'onde pour renforcer le contrôle des frontières extérieures de l'UE, la lutte contre les passeurs et les retours de migrants illégaux.

Ces mesures de longue haleine seront aussi abordées à Malte mercredi et jeudi : les chefs d'État et de gouvernement de l'UE y rencontreront leurs homologues africains, avant de se réunir entre eux à la demande de Donald Tusk, le président du Conseil européen.

À Bruxelles, les ministres doivent aussi plancher lundi sur une «stratégie de communication» afin de s'adresser aux migrants très en amont, dans les camps de réfugiés des pays de transit notamment, «pour qu'ils ne prennent pas la route en se faisant manipuler» par les passeurs, selon une source européenne.

La météo clémente pour la saison facilite l'activité des passeurs : sur l'île grecque de Lesbos, le flot de migrants venant de Turquie ne se tarit pas. Un photographe de l'AFP sur place a vu lundi matin une dizaine d'embarcations avec chacune plusieurs dizaines de passagers, débarquer sur les plages du nord de l'île.

À l'autre extrémité de leur longue route, en Suède, le gouvernement a dit «stop» la semaine dernière, demandant à ses partenaires européens la «relocalisation» de réfugiés arrivés sur son sol et annonçant un durcissement des conditions du regroupement familial.

Comme la Suède, de nombreux gouvernements en Europe voient avec inquiétude monter les partis extrêmes qui se prévalent de l'inquiétude, voire de l'hostilité, de l'électorat, face à cette crise migratoire sans précédent depuis la fin de la Deuxième Guerre mondiale.

C'est le cas de la France, où le Front national (FN, extrême droite) espère des scores historiques lors des élections régionales en décembre, ou de l'Allemagne, où le parti populiste AfD, désormais crédité de 9 % des intentions de vote dans un sondage, a rassemblé 5000 manifestants samedi à Berlin contre la politique d'accueil d'Angela Merkel.