Le président de la Commission européenne Jean-Claude Juncker doit présenter mercredi ses propositions pour répartir 120 000 réfugiés dans l'UE, un «premier pas» selon l'Allemagne, qui appelle à un système de quotas sans plafond.

Lors de son discours sur l'état de l'Union devant le Parlement européen à Strasbourg, M. Juncker doit détailler un plan dont les grandes lignes sont déjà connues.

Il prévoit de répartir entre États membres de l'UE 120 000 réfugiés au cours des deux prochaines années. Ces quotas d'accueil placent l'Allemagne en première ligne (26,2%, 31.443 réfugiés), suivie de la France (20%, 24 031) et de l'Espagne (12,4%, 14 931).

Mais l'Allemagne a appelé mardi ses partenaires européens à ouvrir plus grand leurs portes aux dizaines de milliers de réfugiés qui se pressent aux frontières du Vieux Continent.

«Nous avons besoin au final d'un système ouvert de quotas pour la répartition obligatoire des personnes qui ont un droit à l'asile», a déclaré la chancelière Angela Merkel, jugeant que plafonner à l'avance le nombre de migrants n'avait aucun sens.

Selon elle, la proposition attendue de la Commission européenne n'est qu'un «premier pas», malgré les réticences de certains pays européens.

Concernant la seule Allemagne, «je pense que nous pouvons certainement gérer un chiffre de l'ordre du demi-million (de réfugiés par an) pendant plusieurs années (...) peut-être même plus», a déclaré de son côté le vice-chancelier social-démocrate, Sigmar Gabriel.

Mme Merkel doit s'expliquer sur le sujet mercredi matin devant les députés allemands.

Incidents à la frontière serbo-hongroise 

Selon les derniers chiffres de l'ONU, plus de 380 000 migrants et réfugiés sont arrivés en Europe par la Méditerranée depuis janvier et 2850 sont morts ou portés disparus.

Devenue le lieu emblématique d'une vague sans précédent depuis 1945, la petite île grecque de Lesbos doit accueillir à elle seule 20 000 candidats à l'exil, soit le quart de sa population. Depuis lundi soir, les autorités y ont enregistré 14 000 personnes.

Des centaines de personnes attendaient mardi soir dans le principal port de l'île pour prendre un ferry et poursuivre leur voyage vers l'Europe du nord.

Le président du Conseil européen, Donald Tusk, qui avait parlé lundi d'un «exode» qui risquait de durer «des années», a déclaré mardi qu'il fallait se «concentrer sur le combat contre le trafic d'êtres humains et les passeurs» ainsi que sur les opérations pour «sauver la vie des gens».

Dans le sud de la Hongrie, des centaines de migrants ont forcé mardi le cordon de police hongroise à la frontière avec la Serbie, en plusieurs incidents distincts, et les policiers ont fait usage de gaz au poivre ou de gaz lacrymogène, ont rapporté des médias locaux.

Une loi récemment votée par Budapest qui rend l'immigration illégale passible d'une peine allant jusqu'à trois ans de prison pourrait «conduire au chaos», a averti le Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR).

L'Autriche a renoncé à contrôler les trains à la frontière avec la Hongrie et des trains spéciaux relient désormais Vienne à Munich.

L'Allemagne, qui s'attend à 800 000 demandes d'asile rien que cette année, a vu arriver environ 6000 personnes entre lundi et mardi matin, en plus des 20 000 du week-end.

«Dans la rue s'il le faut»

Cependant, après avoir, pour beaucoup, fui les horreurs de la guerre pour gagner la plus puissante économie européenne, les réfugiés se retrouvent plongés dans les méandres de la bureaucratie allemande, débordée.

Dans les centres d'accueil, l'atmosphère était chaotique mardi, alors que les places dans les centres d'hébergement font défaut partout en Allemagne.

Mais il n'y a pas assez d'appartements à Berlin et les hôtels souvent «ne veulent pas accepter les réfugiés», affirmait à Berlin Veron, un Syrien de 30 ans. «Nous resterons dans la rue s'il le faut», assurait-il.

Malgré les difficultés, les signes de solidarité, publics et privés, se multiplient un peu partout en Europe.

Les clubs de foot engagés dans l'Europa League vont ainsi donner un euro par billet vendu de leur première rencontre européenne. En Norvège, un milliardaire a offert 5000 nuitées dans les établissements de son groupe hôtelier.

Le secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon, a exhorté les dirigeants européens à se montrer solidaires des réfugiés, «qui ont le droit de chercher asile sans subir aucune forme de discrimination», et organisera le 30 septembre, à New York, une réunion sur ce dossier.

L'ONG Amnesty international appelle l'UE à revoir de manière urgente ses règles d'asile.

L'organisation réclame entre autres la mise en place de routes sécurisées pour permettre aux réfugiés de gagner l'Europe.

Au Royaume-Uni, où le gouvernement s'est dit prêt à accueillir 20.000 réfugiés en cinq ans, l'opposition travailliste a appelé le premier ministre David Cameron à proposer un plan «plus ambitieux».

En Espagne, les municipalités dirigées par le mouvement des «indignés», notamment Barcelone, ont lancé un mouvement citoyen pour créer un réseau de «villes-refuges européennes».

Après avoir paru en retrait, la France s'organise pour faire venir dès mercredi d'Allemagne, par «solidarité», un premier contingent de 200 Syriens ou d'Irakiens. Elle s'est dite prêt à ouvrir ses portes à 24 000 réfugiés dans les deux prochaines années.

La Maison-Blanche, critiquée pour son manque de réactivité face à la crise des réfugiés syriens, a indiqué qu'elle envisageait de nouvelles mesures pour y répondre.

Le Premier ministre Tony Abbott a annoncé que l'Australie allait accueillir 12 000 réfugiés supplémentaires en réponse à la crise des migrants fuyant la Syrie et l'Irak, en plus des 13 500 qu'elle accepte chaque année.

L'accueil sera prioritairement réservé aux femmes, enfants et familles appartenant aux minorités persécutées et réfugiés en Jordanie, au Liban et en Turquie.