Il n'y a pas que le président américain Barack Obama qui espère favoriser l'emploi et la prospérité en encourageant ses concitoyens à acheter des produits du pays. Outre-Atlantique, les politiciens engagés dans la bataille pour l'élection présidentielle française n'en ont que pour le «Produit en France», explique notre journaliste.

Une fièvre patriotique frappe la classe politique française qui décrit, avec une rare unanimité, la promotion des produits fabriqués au pays comme une piste de sortie à la crise économique.

À tour de rôle, la quasi-totalité des candidats engagés dans la bataille présidentielle ont abordé le sujet au cours des derniers mois, faisant de l'achat national l'apparente panacée aux problèmes de chômage et de désindustrialisation qui minent le pays.

Le candidat centriste François Bayrou en a fait l'un des points centraux de son programme.

«Quand s'affirmera le grand effort national du «produire en France», il faut que les Français consommateurs soient le soutien actif des Français producteurs», a déclaré le leader du Modem, qui récolte environ 15% des voix dans les sondages.

Il est encore revenu à la charge il y a quelques jours lors de la visite d'une usine de lingerie en Haute-Loire qui sera bientôt fermée. «Beaucoup de Français peuvent mettre deux euros de plus pour acheter des produits bénéficiant d'un label «Produit en France»», a-t-il déclaré.

Visitant la même usine, le socialiste Arnaud Montebourg s'est porté à la défense du «soutien-gorge tricolore» devant une centaine d'employées sur le point d'être remerciées. «Vous symbolisez la situation du pays [...] qui a perdu 750 000 emplois industriels en cinq ans», a lancé le politicien, délégué sur place par le candidat socialiste à l'élection, François Hollande.

La formation de gauche fait aussi de la promotion de produits français l'un de ses axes d'action pour relancer l'emploi. Tout comme le président Nicolas Sarkozy, qui s'est rendu récemment dans une usine du fabricant Rossignol pour défendre l'idée d'un nouveau label «Origine France garantie».

Ce label a été lancé il y a six mois sous la supervision de l'ex-ministre Yves Jégo, qui accuse François Bayrou de «s'installer dans le nid» de la droite en cherchant à explorer ce créneau.

«Intérêt collectif»

La frénésie politique entourant la question n'étonne pas outre mesure Arnaud Verheyde, qui a fondé il y a quelques années une entreprise de vente en ligne vouée aux produits français.

La thématique est «historiquement toujours très fréquente dans les périodes de crise économique», relève le fondateur du site Acheter Français, qui offre des produits à fort contenu national.

C'est en partie parce qu'il était indigné des dommages causés à l'industrie française par la prolifération de produits chinois à bon marché que l'entrepreneur a décidé de se lancer dans cette avenue.

Selon lui, il est possible pour les firmes françaises de rester compétitives et de maintenir les emplois en sol français en misant sur des produits de qualité. Les consommateurs, eux, doivent cesser de se focaliser uniquement sur le prix au détriment d'autres considérations, incluant l'impact sur l'emploi et l'économie.

«C'est un calcul à court terme de toujours aller acheter le moins cher. Il y a un intérêt individuel qui va à l'encontre de l'intérêt collectif», juge M. Verheyde.

Les personnes qui achètent des produits venant de l'étranger «sans jamais regarder les étiquettes» et qui se plaignent des délocalisations sont hypocrites, dit l'homme d'affaires, qui insiste sur la différence entre sa démarche et celle des adeptes du protectionnisme.

«Le protectionnisme se traduit par une loi, une contrainte. Là, ce n'est pas du tout le mode de fonctionnement. On tente de sensibiliser les consommateurs à l'impact de leurs décisions d'achat», souligne-t-il.