Le premier tour de la primaire tenu dimanche, en France, par le Parti socialiste (PS) pour choisir son candidat présidentiel a connu un franc succès qu'ont relevé la plupart des médias du pays. La suite des choses s'annonce cependant plus corsée.

Les ténors de la formation de gauche craignent que la rivalité entre les deux favoris, François Hollande et Martine Aubry, tourne au vinaigre d'ici au second tour prévu pour les départager.

Le premier, qui disposait d'une avance confortable dans les sondages, a obtenu 39,2% des quelque 2,5 millions de votes enregistrés, comparativement à 30,7% pour sa rivale.

Ils ont été suivis par le député de Saône-et-Loire, Arnaud Montebourg, qui a causé la surprise en arrivant, avec 17% des voix, loin devant l'ex-championne socialiste Ségolène Royal, en chute libre à 7%, et un autre candidat de la nouvelle garde, Manuel Valls, à 5%.

Le premier secrétaire par intérim du PS, Harlem Désir, a prévenu hier qu'il fallait que le débat «porte sur les idées et qu'il n'y ait pas de mise en cause des personnes» d'ici au jour du scrutin.

«On doit pendant toute cette campagne penser non seulement au 16, mais aussi au 17 et au 22, c'est-à-dire le moment où nous serons réunis pour faire campagne contre Nicolas Sarkozy», a-t-il relevé en évoquant le lendemain de la primaire et la journée retenue en avril 2012 pour le premier tour de l'élection présidentielle.

Bien que les débats télévisés tenus entre les candidats soient demeurés polis, le ton de la campagne socialiste s'est durci dans les jours précédant le vote.

Martine Aubry, qui a abandonné son poste de première secrétaire du PS pour se lancer dans la course, a ciblé le favori en relevant qu'il ne fallait pas «une gauche molle» pour triompher de la «droite dure».

François Hollande avait quant à lui appelé les électeurs à lui donner un large soutien dès le premier tour pour le placer en position de force devant Nicolas Sarkozy, toujours au plus bas dans les sondages avec une cote de popularité tournant autour de 33%.

Dans les jours précédant le scrutin, l'entourage de M. Hollande évoquait la possibilité d'une victoire au premier tour de leur héraut, qui «pense» maintenant remporter la victoire dimanche prochain, mais «pas avec une marge très grande».

Une bonne part de l'équation dépend d'Arnaud Montebourg, qui jubilait hier de son ascension dans les sondages. Le politicien de 48 ans, très à gauche sur l'échiquier politique, se retrouve en position de «faiseur de roi» en raison du bloc considérable de votants qu'il a ralliés à sa cause.

Plutôt que d'appuyer Martine Aubry ou François Hollande, il a fait savoir hier soir qu'il leur avait adressé une lettre ouverte pour leur demander de prendre position sur des thèmes centraux de sa campagne, comme celui de la nationalisation des banques ou la «démondialisation».

Il pourrait ensuite annoncer sa préférence personnelle sans pour autant donner de consigne de vote, ou ne faire aucun choix sous prétexte que ses anciens rivaux forment «les deux faces d'une même pièce».

Blessure royale

Les deux candidats auront aussi le regard tourné vers Ségolène Royal, qui a encaissé durement la défaite, s'abandonnant aux larmes devant les caméras dimanche soir.

Plusieurs médias ont souligné hier que l'ancienne candidate socialiste aurait du mal à choisir entre son ex-mari, avec qui elle a quatre enfants, et Martine Aubry, qui l'avait devancée de peu en 2008 lors d'un scrutin controversé pour prendre la tête de la formation socialiste.

Un psychiatre interrogé hier par le quotidien Le Figaro croit savoir qu'elle penchera plutôt pour François Hollande. «Statistiquement, une femme en voudra plus à celle qui lui a infligé une blessure narcissique dans le champ social qu'à l'homme associé à une rupture sentimentale», a déclaré Roland Coutanceau.

Manuel Valls a immédiatement appelé dimanche ses partisans à soutenir le gagnant du premier tour en saluant la «cohérence» de sa démarche et sa franchise sur la situation économique du pays.

La droite, secouée par la perte récente du contrôle du Sénat, s'est montrée partagée, hier, sur le résultat de l'exercice mené par les socialistes.

Le secrétaire général du parti de la majorité, Jean-François Copé, a indiqué avec ironie qu'il suivrait de près «les négociations, marchandages et braderies en tous genres» qui précéderont, selon lui, le second tour du scrutin.

Le ministre de l'Éducation, Luc Chatel, a salué pour sa part le «système de sélection» mis en place par les socialistes, relevant qu'il correspond «à la fois aux attentes des Français et à ce que l'on attend du fonctionnement d'un parti politique».