Les habitants de Bilin, en Cisjordanie, ont célébré une victoire la semaine dernière. Après plusieurs années de lutte, l'armée israélienne a commencé à démanteler une partie de la «clôture de séparation» qui traverse leurs terres. Mais leur succès ne signifie pas la fin de leur combat pour autant, disent-ils.

Du toit de sa maison, Ahmad Alkhatib contemple un paysage composé de collines et de vallées. Au pied du bâtiment s'étend son village natal, Bilin. Au loin, une colonie israélienne aux toits orangés. Entre les deux, la fameuse barrière qui sépare Israël de la Cisjordanie.

Comme plusieurs habitants de Bilin, situé à 12 km de Ramallah, M. Alkhatib a perdu une partie de ses terres après la construction du «mur de sécurité», mis en place par les Israéliens à partir de 2002 pour prévenir les attaques. L'amalgame de clôtures, de barbelés et de béton - qui n'est pas encore terminé - empiète à plusieurs endroits sur les terres palestiniennes.

La semaine dernière, l'armée israélienne a commencé à démanteler les barbelés à Bilin. Le gouvernement s'est ainsi conformé à une décision de la Cour israélienne rendue il y a quatre ans. Celle-ci exigeait un nouveau tracé, jugeant que la clôture empiétait de façon trop importante sur des terrains privés palestiniens. Un nouveau mur de béton a déjà été mis en place, à quelques centaines de mètres de la clôture originale.

«Je suis très content, a réagi M. Alkhatib. Mais je serai encore plus content quand le mur sera complètement démantelé.»

Symbole de la résistance

La nouvelle a été accueillie comme une victoire populaire à Bilin. C'est que le petit village de 1800 âmes est devenu au fil des ans un véritable symbole de résistance dans les Territoires palestiniens.

Chaque vendredi depuis six ans, Bilin accueille Palestiniens, Israéliens de gauche et militants étrangers, qui manifestent contre la clôture de séparation. De l'autre côté du grillage, des soldats israéliens les ont à l'oeil. Des heurts ont souvent eu lieu. Deux personnes sont mortes dans les manifestations, d'autres ont été blessées et plusieurs ont été arrêtées.

Le mouvement est reconnu par les participants pour être non-violent, même si les organisateurs admettent qu'ils ne peuvent empêcher des jeunes de lancer des pierres sur les soldats. Israël considère le regroupement comme illégal et a recours à des moyens de dispersion de façon régulière.

Vendredi dernier, des manifestants ont conduit un bulldozer jusqu'à la clôture. Le véhicule a dû rebrousser chemin dans un nuage de gaz lacrymogènes.

Selon Mohammed Khatib, un des organisateurs des manifestations, le démantèlement de la clôture ne signifie pas la fin de la lutte pour Bilin. «Nous allons continuer de nous battre, insiste-t-il. Notre village est devenu un symbole de résistance populaire. Nous ne savons pas quel visage prendra cette résistance, mais nous allons continuer.»

Seuls 150 acres seront rendus aux villageois - 340 acres demeurent du côté israélien.

Ahmad Alkhatib espère retrouver le plein accès à ses terres. Muni d'une autorisation, l'homme de 58 ans continuait de se rendre sur une partie de son terrain presque chaque semaine. Mais l'accès dépendait du bon vouloir des soldats qui en gardaient l'entrée, dit-il.

«Avant la confiscation, je travaillais la terre, souligne-t-il. Si j'ai de nouveau accès, je vais continuer à travailler la terre. Et je vais replanter les oliviers déracinés.»