Le «sommet de la bière» à la Maison-Blanche a attiré tellement d'attention cette semaine aux États-Unis qu'il est impossible de ne pas y voir la manifestation d'un phénomène plus large.

En vérité, le pays entier a besoin d'une bière.

La crise économique fait les manchettes depuis plus d'un an. La réforme de l'assurance santé irrite à peu près tout le monde. La guerre en Afghanistan s'éternise. Les banques font des milliards en profits au moment où des millions de travailleurs ramassent leurs effets personnels et quittent leur bureau pour la dernière fois.

 

Cette dose de réalité frappe tous les Américains. Or, le choc est particulièrement brutal en Californie, qui se débat avec un déficit record de 26 milliards.

La bonne nouvelle: l'État le plus populeux des États-Unis vient d'adopter son budget cette semaine.

La mauvaise: le document ratifié par Arnold Schwarzenegger autorise des coupes de 9 milliards dans le système d'éducation, de 2 milliards pour les soins de santé offerts aux personnes pauvres, et de 1,2 milliard dans le salaire des employés de l'État. Avec un taux de chômage de 11,6%, l'État est l'un des plus touchés par la crise économique.

«Les négociations sur le budget ont eu lieu à huis clos, mais nous entendions toujours dire que le filet de sécurité pour les plus démunis serait préservé, note Linda Wanner, directrice de la California Catholic Conference.

«Or, en fin de compte, le budget est rempli de coupes draconiennes qui concernent nos enfants et les gens les plus vulnérables.»

Jamais un gouverneur de la Californie n'avait laissé les finances publiques s'embourber à ce point. Jeudi, le jour de son 62e anniversaire, Schwarzenegger a reçu les résultats du dernier sondage d'opinion mené sur sa cote de popularité. À peine 28% des électeurs sont satisfaits de leur gouverneur, tandis que 59% désapprouvent ses décisions.

Le ciel n'est encore tombé sur la tête de personne en Californie. Les touristes ont envahi les plages. Les autoroutes sont bondées. Des travailleurs de partout sur la planète postulent pour venir travailler chez Google, Pixar ou Apple.

Mais une simple conversation avec un voisin, ou un collègue, laisse apparaître l'étendue du problème. Bien des commerçants paient le loyer avec leurs économies (ou leur carte de crédit), en espérant que les clients recommencent bientôt à dépenser. Plusieurs travailleurs craignent de perdre leur emploi et, du même coup, l'assurance santé fournie par leur employeur.

Il y a quelques mois, les États-Unis semblaient voguer sur une vague d'optimisme et de bons sentiments. Plus maintenant. Aujourd'hui, l'extrême droite scrute le certificat de naissance de Barack Obama, et l'arrestation d'un universitaire noir dans sa propre maison monopolise les conversations.

Des idées pas très reluisantes commencent à faire leur chemin. Ces jours-ci, le gouvernement californien jongle avec la possibilité d'autoriser l'extraction de pétrole dans des réserves situées sous l'océan Pacifique, à cinq kilomètres des côtes de Santa Barbara, du jamais vu en 40 ans. Des revenus de 1,8 milliard pour l'État en découleraient.

Les écologistes sont contre, bien sûr. Mais ce ne sont pas eux qui paient la bière.