Une voiture projetée contre une synagogue à Toulouse, des cocktails Molotov lancés contre un autre établissement de même nature à Saint-Denis, en banlieue parisienne, une jeune collégienne juive attaquée et blessée par des jeunes de son école qui réclament vengeance pour les bombardements...

Les affrontements en cours dans la bande de Gaza résonnent lourdement en France, où se multiplient les actes d'antisémitisme au grand dam de la classe politique et des associations antiracistes, inquiètes d'une «importation» du conflit.

L'Union des étudiants juifs de France (UEJF) dit avoir recensé depuis le début de l'offensive israélienne plus de 55 actes antisémites.

Il s'agit d'une véritable « déferlante », souligne en entrevue le président de l'organisation, Raphaël Haddad, qui a participé lundi à une rencontre d'urgence avec la secrétaire d'État à la politique de la Ville, Fadela Amara, et une vingtaine d'associations actives sur le terrain. Elles se sont engagées à lancer rapidement une campagne en faveur du « vivre ensemble».

Le porte-parole de l'UEJF déplore que les médias tendent à renvoyer les communautés juives et musulmanes du pays «dos à dos», adoptant un cadre d'analyse trop étroit.

«L'antisémitisme est l'affaire de tous les Français, pas seulement des juifs et des musulmans. Chacun doit s'investir dans la défense des idéaux républicains», indique M. Haddad, qui s'inquiète des « appels à la haine » entendus lors de certaines manifestations pro-palestiniennes.

Les critiques de l'intervention israélienne font partie du débat démocratique et doivent pouvoir s'exprimer. Mais sans tomber dans l'excès verbal ou la violence, juge-t-il.

«Le passage à l'acte fondé sur un amalgame du type : ''Tous les juifs sont israéliens, donc il est légitime que je frappe mon voisin juif'' est dramatique», relève le président de l'UEJF.

Les tensions liées au conflit transparaissent dans les médias, où partisans pro-palestiniens et pro-israéliens s'invectivent. Le quotidien Libération a interrompu la publication des commentaires de lecteurs à ce sujet sur son site internet en début de semaine, sous prétexte que plusieurs interventions étaient de nature haineuse. Avant d'avoir à se défendre de vouloir censurer le débat.

Les Français préoccupés

Dans un récent sondage, 64 % des Français se disent préoccupés par les répercussions que pourrait avoir le conflit sur les relations entre juifs et musulmans dans le pays.

L'association Ni putes ni soumises, très présente dans les banlieues des grandes villes, parle d'une « situation dangereuse » et presse les politiciens de toute allégeance de se montrer « intransigeants et fermes » face aux actes de violence.

Les politiciens multiplient les interventions publiques depuis quelques jours dans l'espoir d'éviter les débordements tout en demandant aux préfectures de police de renforcer les mesures de protection des établissements « qui présentent une sensibilité particulière ».

Lors d'une rencontre avec des représentants des communautés juives et musulmanes du pays, le président, Nicolas Sarkozy, a condamné en début de semaine les violences « inadmissibles » commises en France « au prétexte » du conflit au Proche-Orient.

Le premier ministre François Fillon doit chapeauter aujourd'hui une réunion des membres du Comité interministériel de lutte contre le racisme et l'antisémitisme dans l'espoir de trouver des solutions pour « calmer les choses ».

« On est tous choqués par ce qui se passe à Gaza. C'est normal qu'il y ait des manifestations. En revanche, ce n'est pas normal qu'il y ait des agressions », a-t-il déclaré à la télévision française.