« C’est un bain de sang ! » Voilà comment le fils aîné de Donald Trump a décrit sur Twitter les résultats des élections de mi-mandat vers 20 h mardi soir. On ne sait pas dans quel monde parallèle vit Junior.

Au moment d’écrire ces lignes mardi, il apparaissait évident que les républicains étaient en train de faire des gains à la Chambre des représentants.

Rien de bien surprenant. Les sondages avaient prédit que le Grand Old Party était en voie de reprendre le contrôle de la chambre basse du Congrès américain, dont les 435 sièges étaient en jeu mardi.

Par contre, le sort du Sénat, lui, semblait bien incertain. Vers minuit, les deux partis étaient à quasi-égalité alors que le décompte des votes continuait.

Difficile, dans ces circonstances, de parler d’un carnage, d’un « bain de sang » ou même d’une vague républicaine.

Les premiers résultats de ces élections de mi-mandat semblent s’inscrire dans la normalité la plus banale. Historiquement, ce scrutin qui survient deux ans après l’élection du président a tendance à punir son parti et, par le fait même, à restreindre son pouvoir.

Barack Obama est passé par là. Donald Trump aussi. Et c’est maintenant au tour de Joe Biden.

Et peut-on vraiment s’en étonner ? Ce dernier, avec une cote de popularité qui dépasse à peine 41 %, est tout sauf au sommet de sa forme.

Et que dire de son parti ? Même si les démocrates contrôlaient les deux chambres du Congrès depuis 2021, ils ont réussi bien peu de coups de circuit législatifs depuis leur arrivée au pouvoir. Quelques joueurs de leur champ droit ont donné du fil à retordre à toute l’équipe. Les démocrates semblent aujourd’hui payer le prix de leurs chicanes internes et de la hausse du coût de la vie.

Les électeurs qui ont parlé aux journalistes à la sortie des bulletins de vote ont été nombreux à affirmer que l’économie en général et l’inflation en particulier ont guidé leurs choix. Rien de nouveau là non plus. En 1992, c’est en s’appuyant sur le mantra « c’est l’économie, stupide » que Bill Clinton a ravi la présidence à George H. W. Bush.

Tout ça pourrait cependant nous faire oublier que sous leurs airs de normalité, ces élections sont complètement hors norme. Parmi les candidats républicains qui se retrouvaient sur les bulletins de vote d’un bout à l’autre du pays, 291 ont mis en doute la victoire de Joe Biden à l’élection présidentielle de 2020, et ce, sans preuve.

Et mardi, selon les résultats préliminaires, ils s’en sortaient particulièrement bien. Vers 23 h, le Washington Post dénotait qu’au moins 113 d’entre eux avaient remporté leur mise, pour siéger à Washington ou dans les États. Une poignée a été défaite alors que des dizaines d’autres attendaient encore de connaître leur sort.

Ces élus, supporteurs du « grand mensonge » de Donald Trump, auront dorénavant la capacité de nuire au processus démocratique en utilisant les leviers de l’État.

Inquiétant.

Et Donald Trump, dans tout ça ? Le 45e président a déjà affirmé qu’il aura de grandes nouvelles à annoncer – lire, sa candidature à la présidence en 2024 – dès la semaine prochaine. Mardi, on attendait de voir comment ses poulains s’en sortaient dans la course du Sénat. Seul J. D. Vance, l’auteur de Hillbilly Elegy, avait été déclaré vainqueur en Ohio mardi soir. « S’ils gagnent, je devrais avoir tout le crédit. S’ils perdent, je ne devrais pas être blâmé du tout », a dit à ce sujet l’ancien président.

En soirée cependant, l’ancienne star de téléréalité a dû avaler sa salive de travers en voyant le gouverneur de Floride, Ron DeSantis, remporter une victoire éclatante. La bataille de coqs annoncée entre les deux politiciens fait déjà saliver les commentateurs politiques américains.

Il n’y a pas que Joe Biden qui devra se retrousser les manches après ce scrutin.

Non, ces élections de mi-mandat ne semblent pas avoir donné lieu au carnage tant redouté par plusieurs, mais elles n’ont pas été non plus la grande levée de boucliers que nous aurions pu espérer. Contre les dérives antidémocratiques. Contre la désinformation. Et contre le rétrécissement des droits des femmes en matière d’avortement. Ces batailles-là restent encore à mener.