(Port-au-Prince) Les agences humanitaires en Haïti pressent les donateurs internationaux, refroidis par l’instabilité politique qui mine le pays, de contribuer à l’aide d’urgence sans laquelle des dizaines de milliers d’enfants ne pourront faire leur rentrée scolaire le 4 octobre dans leurs écoles frappées par le séisme.    

Le 14 août, plus de 2200 personnes ont été tuées suite au séisme de magnitude 7.2 qui a ravagé la péninsule sud-ouest du pays pauvre, en proie à une profonde crise politique depuis des années.

L’assassinat du très contesté président Jovenel Moïse le 7 juillet a plongé Haïti dans une grande incertitude et les divisions au sein de la classe politique se sont encore amplifiées ces derniers jours, face aux soupçons portés contre le premier ministre dans cette affaire.  

Loin de ces luttes intestines pour le pouvoir à Port-au-Prince, les milliers de familles qui ont tout perdu lors du séisme sont aux abois alors que la rentrée scolaire est prévue dans deux semaines.

On estime que 200 000 enfants ne pourront pas reprendre l’école comme prévu cette année si une mobilisation de l’appui au pays n’est pas renforcée dans les jours qui viennent.

Bruno Maes, directeur de l’UNICEF en Haïti

« Trente-neuf millions de dollars sont nécessaires dans le cadre de l’aide humanitaire d’urgence et l’éducation en urgence, à peine cinq millions ont été alloués », déplore-t-il.  

Plus de 16 % des écoles de la région ont été complètement détruites lors du séisme et plus de la moitié sont endommagées et ne peuvent accueillir des élèves sans travaux de consolidation des bâtiments.  

En visite vendredi et samedi en Haïti, Janez Lenarcic, commissaire européen à la gestion des crises, reconnaît une lassitude des partenaires étrangers à financer l’aide humanitaire du pays.

« Il y a définitivement un signe de ce que l’on peut appeler la fatigue du donateur », a commenté le diplomate européen en déplacement dans la région ravagée par le séisme.  

L’Union européenne a débloqué une aide d’urgence de 3 millions d’euros (4,5 millions de dollars CAN) après le séisme, mais exige des garanties avant la reprise de son aide au développement.  

L’UE avait déjà progressivement gelé son appui budgétaire à Haïti, car, aucune élection n’ayant été organisée depuis 2016, le pays ne dispose plus de parlement fonctionnel depuis janvier 2020.  

Janez Lenarcic rappelle que l’Union européenne ne débloquera pas son aide au développement, qui avoisinerait les 400 millions d’euros (599 millions de dollars CAN) pour la période 2021-2028, sans des garanties démocratiques.

« Il faut que cette crise politique soit résolue, que les institutions soient renforcées et que le contrôle (des fonds) soit amélioré, que la corruption soit éradiquée, car, sans cela, l’aide au développement ne peut atteindre son objectif », a rappelé le commissaire européen.