L'Église anglicane australienne fait face à la révolte d'un groupe d'anciens élèves d'une prestigieuse école privée pour avoir versé des dizaines de milliers de dollars au fraudeur et meurtrier Grant Mathiesen, qui prétend avoir été agressé sexuellement dans trois écoles différentes au cours de son enfance.

En juin, La Presse a dévoilé l'audacieux stratagème de l'Australien Grant Mathiesen, qui soutient notamment avoir été sodomisé par deux religieux québécois à l'école primaire St. Mary's de Tokyo, en 1965. L'homme a tenté d'extorquer pas moins de 64 millions de dollars aux Frères de l'instruction chrétienne en 2014.

La congrégation religieuse, dont la maison mère est située à La Prairie, estime avoir été la cible d'une fraude élaborée. Elle a déposé une plainte à la police australienne, dont les résultats ne sont pas encore connus.

Le 10 décembre, un groupe d'anciens élèves d'une autre école visée par Mathiesen, l'Anglican Church Grammar School de Brisbane (Churchie), a lancé une initiative pour dissoudre le conseil d'administration de cet établissement, dirigé par l'Église anglicane.

Baptisé « Rescue Churchie », le groupe revendique un millier de membres et « cherche à remplacer le Conseil diocésain anglican, le conseil d'administration de Churchie, par une direction scolaire autonome qui respectera les principes de gouvernance d'entreprise du XXIe siècle et les meilleures pratiques », lit-on sur le site internet de Rescue Churchie.

Selon The Courier-Mail de Brisbane, de grands entrepreneurs australiens, comme le président de Qantas Airways, Leigh Clifford, soutiennent l'initiative pour « mettre fin à l'âge des ténèbres » des directions scolaires nommées par l'Église.

« Rescue Churchie est né de la colère et de l'incrédulité » face à la « diffamation » subie par l'ancien directeur de cette école, Harry Roberts.

Affirmant que le directeur n'avait rien fait pour le protéger, Mathiesen a en effet réclamé - et obtenu - que le nom de M. Roberts soit retiré de la nouvelle bibliothèque de Churchie.

Accusations contre trois écoles

Mathiesen soutient avoir été sodomisé par Harry Wippell, un ancien surveillant de dortoir à Churchie, en 1967. L'an dernier, l'archevêque anglican Philip Aspinall lui a présenté par écrit des « excuses sans réserve » pour le « crime et le bris de confiance ».

Refusant de discuter d'un cas en particulier, un porte-parole de l'archevêché a écrit à La Presse qu'« aucune victime de Harry Wippell à Churchie n'a reçu plus de 45 000 $AUS [44 000 $CAN] ».

L'archevêché défend sa décision d'effacer la mémoire de M. Roberts à Churchie, puisque l'ancien directeur n'aurait pas pris les mesures nécessaires pour protéger d'autres victimes.

Au cours des dernières années, Mathiesen a affirmé avoir été agressé sexuellement dans au moins trois écoles. En 2015, il a prétendu faire partie des victimes de Kevin Lynch, prédateur sexuel qui a sévi dans son ancienne école secondaire. Or, Mathiesen ne fréquentait plus l'établissement à l'époque où Lynch y a commis ses crimes.

Condamné à perpétuité pour meurtre

En 1980, Grant Mathiesen a attiré une femme philippine en Australie sous de faux prétextes, puis l'a assassinée dans le seul but de toucher le produit de ses polices d'assurance vie. Condamné à la prison à perpétuité, il a été libéré sous conditions en 1996. Le détective qui a résolu l'affaire se rappelle avoir eu affaire à un fraudeur endurci d'une « terrible cruauté ».

Les allégations de viol portées par Mathiesen ont bouleversé la vie des deux religieux québécois. L'un d'eux, Guy Lambert, a dû rentrer d'urgence au Québec après une vie consacrée à l'enseignement au Japon.

Les Frères de l'instruction chrétienne ont déposé une plainte pour « harcèlement criminel à l'aide d'un ordinateur » contre Mathiesen à la police de Brisbane. Mathiesen nie toute tentative de fraude, qualifiant les prétentions de la congrégation québécoise de « répugnantes ».