Après avoir joué les gros bras pendant quelques jours, le président américain Donald Trump est revenu à la politique de ses prédécesseurs vis-à-vis de la Corée du Nord: s'en remettre à la Chine pour faire pression sur Pyongyang et son inquiétant programme nucléaire.

«L'armada» américaine «très puissante» promise par Donald Trump près de la péninsule coréenne en réponse à la menace de Pyongyang n'a même pas encore commencé à naviguer vers cette zone, a reconnu mardi un responsable américain de la Défense.

Le porte-avions américain Carl Vinson et son escorte ont en effet pris une route inverse, en direction de l'Australie, pour participer à des exercices militaires.

De hauts responsables à Washington expriment désormais l'espoir que le puissant voisin de la Corée du Nord exercera suffisamment de pressions politiques et économiques pour que Pyongyang arrête ses essais nucléaires.

Pékin avait déjà promis de le faire et les experts préviennent qu'il n'y a pas de raison particulière pour que la Chine honore cette promesse aujourd'hui. Mais la Maison-Blanche semble avoir quelques alternatives.

La semaine dernière, le secrétaire à la Défense Jim Mattis avait affirmé que le Carl Vinson était «en chemin» vers la péninsule coréenne. Mais quatre jours plus tard, le porte-avions était photographié en train de naviguer en sens inverse, dans l'Océan indien.

Mardi, il a déclaré que les États-Unis et la Chine «travaillent étroitement» sur le dossier nord-coréen en vue d'une dénucléarisation de la péninsule. Ajoutant, plein d'espoir: «Nous partageons tous le même intérêt».

Donald Trump lui aussi s'est dit confiant, surtout après un sommet avec son homologue chinois Xi Jinping, que la confrontation pourra être résolue grâce au plein soutien de la Chine.

Défilé de missiles

S'exprimant sur la chaîne Fox, Donald Trump a déclaré avoir un «grand respect» pour Xi et salué le fait que la Chine avait commencé à arrêter ses importations de charbon nord-coréen.

«Personne n'a jamais vu ça. Personne n'a jamais vu de notre côté une réponse aussi positive de la Chine», a-t-il dit.

Mais Pyongyang ne semble pas s'inquiéter d'un éventuel renforcement des sanctions internationales. Ses dirigeants ont promis de poursuivre leurs essais de missiles et leurs essais nucléaires.

L'ambassadeur adjoint de la Corée du Nord à l'ONU a promis les «plus dures représailles» à toute frappe américaine.

Les États-Unis ont plus de 28 000 soldats en Corée du Sud et d'importants actifs militaires dans la région, mais la Corée du Nord a aussi de l'artillerie à portée de Séoul.

La Corée du Sud est en pleine campagne électorale et la population dans le pays et dans la région s'inquiète du risque que le dirigeant nord-coréen Kim Jong-Un ou Donald Trump ne mettent en pratique leurs discours guerriers.

Mais Washington préférerait que la Chine sévisse sur les exportations de charbon et de pétrole nord-coréens, pour dissuader Pyongyang de mener un sixième essai nucléaire.

«Nous avons des éléments tangibles pour dire qu'ils travaillent dans ce sens, mais c'est encore un peu tôt», a indiqué Susan Thornton, secrétaire adjointe du département d'État chargée de l'Asie Pacifique.

«Le président Trump espère beaucoup que les Chinois vont utiliser leur important levier économique sur l'économie nord-coréenne».

Sanctions contournées

Mais les experts de la région sont sceptiques. «Je ne pense toujours pas que la Chine va mettre la pression nécessaire sur la Corée du Nord», estime Anthony Ruggiero, de la Foundation for Defense of Democracies.

Il pense que Pékin ne sanctionnera pas son voisin tant qu'aucune mesure ne sera prise contre les banques chinoises collaborant avec Pyongyang.

Plusieurs entreprises et banques chinoises travaillent en outre avec des réseaux nord-coréens pour contourner les sanctions, affirme-t-il, et seule la menace d'une action en justice par les États-Unis arrêtera ce trafic.

«La seule manière pour que ça fonctionne c'est de cibler les Chinois eux-mêmes», selon lui.

Si la Chine échoue à faire pression sur son voisin, les États-Unis et leurs alliés s'occuperont seuls de la Corée du Nord, a prévenu Donald Trump.

Mais quelles que soient les futures décisions, pour Mme Thornton, les choix sont faits: «Nous avons pris la décision (...) d'exercer le maximum de pression, de pression économique, sur le régime nord-coréen pour qu'il prenne des mesures concrètes afin de revenir sur ses programmes illégaux».