Un riche homme d'affaires chinois qui possède la nationalité canadienne est « disparu » il y a quelques jours à Hong Kong, ce qui suscite de nouvelles craintes quant à la volonté de Pékin d'imposer sa loi à l'ancienne colonie britannique.

Qui est l'homme d'affaires en question ?

Le « disparu » est Xiao Jianhua, qui est considéré comme l'un des hommes les plus riches de Chine. L'entrepreneur de 46 ans, qui entretient des liens avec la famille du président Xi Jinping, s'était établi dans l'ex-colonie britannique il y a quelques années et vivait dans un hôtel de luxe, protégé par une cohorte de gardes du corps féminins. Des médias spécialisés ont rapporté qu'il avait été escorté hors de l'établissement il y a une semaine par des agents des services de sécurité chinois en civil. Il aurait ensuite été emmené en Chine continentale dans un endroit indéterminé.

Que dit son entourage ?

Sa société, Tomorrow Group, qui dispose d'actifs dans plusieurs domaines, incluant l'immobilier, a d'abord publié sur les réseaux sociaux un message provenant supposément de l'homme d'affaires dans lequel il niait avoir été enlevé par les autorités chinoises. Il disait plutôt être « à l'extérieur du pays » en raison d'un problème de santé. La police locale a fait savoir de son côté que Xiao Jianhua avait bel et bien franchi la frontière de l'ancienne colonie le 27 janvier pour se rendre en Chine continentale, contredisant la version avancée par l'entreprise. Sa famille a demandé l'aide des autorités locales dans un premier temps, mais a reculé un jour plus tard. Le gouvernement canadien a indiqué hier que ses représentants étaient « en communication avec les autorités pour obtenir plus de renseignements et offrir leur aide ».

Le scénario est-il inusité ?

Ce n'est pas la première fois qu'un homme d'affaires chinois se retrouve aux prises avec le gouvernement. Plusieurs d'entre eux ont été appréhendés au cours des dernières années dans le cadre d'une campagne anticorruption que les détracteurs du président chinois voient comme un outil de purge politique. L'interpellation de Xiao Jianhua à Hong Kong sans l'accord des autorités locales pose un problème additionnel puisqu'elle met en doute la volonté de Pékin de respecter l'autonomie prévue pour l'ex-colonie à la suite de son transfert par les autorités britanniques.

Le sujet est-il délicat à Hong Kong ?

Jeff Wasserstrom, spécialiste de la Chine rattaché à l'Université de Californie à Irvine, note que les résidants de la colonie ont déjà été échaudés par l'enlèvement, l'année dernière, de cinq libraires ayant irrité Pékin par la diffusion d'ouvrages sur les coulisses du pouvoir. La quasi-totalité a refait surface des mois plus tard après des « confessions » télévisées. L'un d'eux a déclaré à son retour à Hong Kong qu'il avait été détenu en isolement en Chine continentale pendant des mois sans savoir ce qui l'attendait, suscitant l'indignation. La situation de Xiao Jeff Jianhua, dit M. Wasserstrom, va « certainement alimenter les inquiétudes qui existent déjà » dans la colonie quant à la volonté de Pékin d'imposer ses diktats à la population locale sans égard à ses engagements passés.

Faut-il s'attendre à des protestations publiques ?

Les manifestations de grande envergure qui avaient eu lieu en 2014 en vue de changer le mode de désignation du chef du gouvernement de Hong Kong se sont résorbées sans que Pékin lâche du lest. La tension demeure forte depuis et a mené à de nouveaux débordements que les méthodes musclées des autorités chinoises pourraient alimenter. Un bras de fer est notamment survenu à l'automne après que des activistes indépendantistes élus au conseil exécutif eurent refusé de reconnaître l'autorité de la Chine sur la colonie, préférant plaider leur soutien lors de leur prestation de serment à la « nation Hong Kong ». Ils ont ultimement été déclarés inéligibles à siéger avec l'assentiment du gouvernement central. Le président Xi Jinping a prévenu, en novembre, qu'il ne permettrait à aucun parti ou organisation de soustraire à la Chine le moindre pan de son territoire.