Quatre journalistes américains ont été arrêtés dimanche à Bahreïn le jour du cinquième anniversaire du soulèvement du 14 février 2011 dans ce petit royaume du Golfe, ont annoncé les autorités et la famille d'un des reporters.

À Washington, le département d'État a déclaré qu'il était «au courant d'informations selon lesquelles des citoyens américains avaient été arrêtés», mais s'est refusé à tout commentaire «pour des raisons d'ordre privé».

De son côté, la police de Manama, qui a annoncé lundi l'interpellation des quatre journalistes américains, n'a rien dit de leurs identités ni des médias pour lesquels ils travaillent.

Ils ont été appréhendés à Sitra, banlieue de Manama à majorité chiite, qui est l'un des fiefs de la contestation contre la dynastie sunnite au pouvoir à Bahreïn.

Des heurts ont eu lieu dimanche entre des manifestants et des forces de sécurité à Sitra, a indiqué le communiqué publié par l'agence officielle bahreinie BNA.

L'un des quatre Américains était «cagoulé alors qu'il participait à Sitra, avec un groupe de saboteurs, à des troubles et à des attaques contre les forces de sécurité», a affirmé la police, ajoutant que les trois autres avaient été arrêtés à un barrage de police dans le même secteur.

Entrés dans le pays les 11 et 12 février en tant que touristes, «certains» des Américains «ont exercé un travail journalistique sans autorisation», a poursuivi la police, les accusant d'avoir «commis des actes contraires à la loi».

L'affaire a été déférée devant le parquet.

À Washington, la famille d'Anna Therese Day, «journaliste indépendante», a diffusé un communiqué confirmant l'arrestation de la jeune femme qui figure sur des images avec un appareil photo autour du cou.

D'après ce communiqué, les quatre personnes détenues sont des «Américains» et «journalistes» et la famille réclame leur libération «dès que possible». Anna Therese Day a travaillé «au Moyen-Orient, en Afrique du Nord, en Inde, au Brésil et au Mexique» pour plusieurs médias comme «le New York Times, CNN et Al-Jazeera», selon ses proches.

Le Comité pour la protection des journalistes (CPJ), dont le siège est à New York, a appelé à la «libération immédiate des quatre journalistes et de tous les autres journalistes emprisonnés depuis cinq ans» à Bahreïn.

«Il est triste que le cinquième anniversaire (du soulèvement de 2011) soit marqué par l'arrestation de nouveaux journalistes à Bahreïn qui est devenu l'un des pires geôliers de journalistes dans le monde arabe», a estimé Sherif Mansour, coordinateur du CPJ pour le Moyen-Orient et l'Afrique du Nord, dans un communiqué.

Le 3 février dernier, une Cour d'appel de Manama avait confirmé la condamnation d'un photographe, Ahmed al-Fardan, à trois mois de prison pour «participation à une manifestation non autorisée».

Reporters sans frontières (RSF) et le CPJ avaient dénoncé ce verdict et exigé la «libération immédiate» du photographe qui travaille pour le quotidien local Gulf Daily News et a collaboré avec des médias internationaux.

Depuis cinq ans, le royaume de Bahreïn, qui accueille la Ve Flotte des États-Unis, est secoué par des troubles sporadiques dans les localités chiites autour de la capitale Manama, manifestations qui sont systématiquement réprimées par la police.

Le 14 février 2011, Bahreïn avait à son tour été touché par le Printemps arabe. Un mouvement de contestation avait été lancé par la majorité chiite pour réclamer des réformes et la reconnaissance de ses droits politiques par la dynastie sunnite régnante des Al-Khalifa.

Le régime, appuyé par l'Arabie saoudite, avait choisi la répression et emprisonné les animateurs de la contestation.

Cheikh Ali Salmane, le chef d'Al-Wefaq, principal groupe de l'opposition chiite, a été condamné en juin 2015 à quatre ans de prison pour incitation à la désobéissance. Des dizaines d'autres dissidents ont été incarcérés ou déchus de leur nationalité.

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Anna Therese Day