Pyongyang a annoncé vendredi l'arrestation d'un étudiant américain accusé d'«activités hostiles», au moment où Washington pousse pour un durcissement des sanctions contre la Corée du Nord pour son dernier essai nucléaire.

La tension est montée d'un cran sur la péninsule coréenne depuis que le régime le plus reclus au monde a procédé début janvier à un quatrième essai nucléaire, s'attirant une vague unanime de condamnations internationales.

Pyongyang a souvent par le passé utilisé des détenus étrangers comme monnaie d'échange pour obtenir telle ou telle concession.

Vendredi, l'agence officielle KCNA a identifié l'étudiant interpellé comme étant un certain Frederick Otto Warmbier, inscrit à l'Université de Virginie.

Il est entré en Corée du Nord avec un visa de touriste «pour détruire les fondations de l'unité de la RPDC avec la connivence tacite du gouvernement américain et sous sa manipulation», a affirmé KCNA dans une dépêche en anglais.

«Il a été arrêté alors qu'il menait des activités hostiles à la RPDC et il fait l'objet d'une enquête», ajoute l'agence en utilisant l'acronyme officiel du régime, la République populaire démocratique de Corée.

KCNA ne précise pas ces accusations ni la date à laquelle l'étudiant est entré en Corée du Nord, ou celle à laquelle il a été arrêté.

L'expression «activités hostiles» est employée à toutes les sauces par le régime nord-coréen, allant d'activités évangéliques à de l'espionnage.



Washington au courant

Les États-Unis sont «au courant d'informations de presse» faisant état de l'arrestation en Corée du Nord d'un Américain, a indiqué vendredi le département d'État après que Pyongyang eut annoncé l'arrestation d'un étudiant américain accusé d'«activités hostiles».

«Nous sommes au courant d'informations des médias sur le fait qu'un citoyen américain est détenu en Corée du Nord», mais «nous n'avons pas plus d'informations à partager en raison de considérations liées à la vie privée», a déclaré le porte-parole de la diplomatie américaine John Kirby, dans une formule traditionnelle pour ce type d'affaires, en marge du Forum économique de Davos auquel assiste son ministre John Kerry.

«Dans les cas d'informations sur des ressortissants américains arrêtés en Corée du Nord, nous travaillons avec l'ambassade de Suède», a ajouté M. Kirby.

Il a rappelé que «le bien-être des citoyens américains était l'une des premières priorités du département d'État».

Pourparlers à cinq?

Cette interpellation intervient trois mois après la libération d'un étudiant sud-coréen de l'Université de New York (NYU), Joo Won-Moon, 21 ans, qui avait été arrêté en avril pour entrée illégale en Corée du Nord.

Titulaire d'un permis de résidence permanente aux États-Unis, il n'avait pas fait l'objet d'un procès, contrairement à de nombreux autres étrangers arrêtés en Corée du Nord.

Les États-Unis n'ont aucune relation diplomatique ou consulaire avec la Corée du Nord. C'est l'ambassade de Suède à Pyongyang qui fournit des services consulaires limités aux ressortissants américains incarcérés en Corée du Nord.

Plusieurs Américains ont été détenus en Corée du Nord ces dernières années, parmi lesquels Kenneth Bae, un missionnaire né en Corée du Sud qui avait également été accusé d'«activités hostiles». Il avait été condamné en 2013 à 15 ans de travaux forcés.

Il avait été libéré en novembre 2014 en même temps qu'un de ses compatriotes, Matthew Todd Miller, à l'issue d'une rare mission secrète menée à Pyongyang par le chef du renseignement américain James Clapper.

Le régime nord-coréen détient également un pasteur canadien de 60 ans, Hyeon Soo Lim, qui a été condamné aux travaux forcés pour avoir voulu renverser le régime.

En marge d'un entretien accordé à CNN à Pyongyang par Hyeon Soo Lim, la Corée du Nord a présenté un autre prisonnier comme étant un citoyen américain interpellé pour espionnage en octobre.

Le fait que M. Warmbier soit accusé d'avoir agi pour le gouvernement américain laisse penser qu'il pourrait être inculpé d'espionnage.

L'annonce de cette arrestation intervient au moment où d'intenses consultations sont en cours pour déterminer le contenu d'un nouveau train de sanctions internationales contre la Corée du Nord.

Pyongyang a claironné le 6 janvier l'essai réussi d'une bombe à hydrogène. Mais cette affirmation a été mise en doute par les experts, la puissance de l'explosion détectée ce jour-là ne correspondant pas à celle d'une bombe H.

La Corée du Sud, elle, a d'ores et déjà riposté en rallumant ses puissants haut-parleurs installés à la frontière et qui diffusent à pleine puissance en direction du Nord des messages de propagande.

La présidente sud-coréenne, Park Geun-hye, s'est par ailleurs prononcée vendredi pour une reprise des discussions à six sur le programme nucléaire nord-coréen, mais en excluant Pyongyang.

Ces négociations, qui incluaient les deux Corées, le Japon, la Chine, les États-Unis et la Russie ont débuté en 2003 dans le but de démanteler le programme nucléaire nord-coréen.

Mais Pyongyang les a quittées en 2009 pour protester contre les sanctions sur son programme balistique.