La justice du Bangladesh a ordonné lundi l'arrestation de 24 fuyards poursuivis pour meurtres dans l'effondrement du Rana Plaza, bâtiment industriel qui s'était écroulé en provoquant la mort de plus de 1100 ouvriers textiles, ainsi que la saisie de leurs biens.

Le tribunal a confirmé l'inculpation pour meurtres d'un total de 41 personnes dans ce drame survenu en avril 2013 à Savar, en banlieue de Dacca, le pire accident industriel de l'histoire du pays et l'un des plus graves dans le monde.

Cette tragédie avait montré au grand jour les conditions de travail déplorables des quatre millions d'ouvriers du secteur textile au Bangladesh, deuxième plus grand exportateur mondial du secteur, qui fabrique à tour de bras des vêtements pour les distributeurs occidentaux.

«Le tribunal a accepté les inculpations pour meurtres prononcées contre 41 personnes dans le désastre du Rana Plaza», a déclaré le procureur Anwarul Kabir à l'AFP.

«Il a lancé des mandats d'arrêt contre 24 d'entre elles, car elles sont en fuite. Il a également ordonné la saisie de leurs biens», a-t-il ajouté, expliquant que le tribunal avait donné à la police jusqu'au 27 janvier pour lui rendre compte du déroulement de ces arrestations.

Parmi les personnes inculpées pour meurtres, figure le propriétaire du Rana Plaza, Sohel Rana. M. Rana, qui se trouve en détention, est devenu l'ennemi public numéro un au Bangladesh lorsque des survivants ont raconté comment ils avaient été forcés à travailler par milliers en dépit des fissures apparues la veille sur les murs.

Sohel Rana avait été arrêté à la frontière occidentale avec l'Inde alors qu'il tentait de s'enfuir, quelques jours après le drame. Ses parents, qui étaient copropriétaires du bâtiment, et le maire de la ville où est situé le complexe, sont également poursuivis pour meurtres.

De même, le tribunal a confirmé l'inculpation de quatre inspecteurs d'usines, de bâtiments et de travaux publics en dépit des pressions de leurs départements respectifs pour les protéger des poursuites au motif qu'il s'agit de fonctionnaires, a ajouté le procureur.

Pilier de l'économie

Parmi les personnes recherchées par la justice se trouvent des «associés de Rana» qui avaient «frappé et forcé» les ouvriers à prendre leur poste, a ajouté M. Kabir.

Le procès devrait avoir lieu en avril 2016.

Au moins 1138 personnes ont péri dans la catastrophe. Les secouristes avaient passé des semaines à tenter de récupérer les corps dans les décombres, mais plusieurs personnes sont toujours portées disparues.

Plus de 2000 personnes avaient été blessées, dont bon nombre ont été mutilées.

Parallèlement, des poursuites distinctes ont été engagées contre M. Rana et 41 autres personnes pour violations du code de la construction. Elles sont accusées d'avoir illégalement surélevé l'édifice de six étages, conçu à l'origine pour abriter un centre commercial, et l'avoir transformé en un complexe industriel de neuf étages.

Les exportations du secteur textile du Bangladesh représentent environ 25 milliards de dollars par an et l'habillement est le pilier de son économie.

L'affaire avait suscité l'indignation à travers le monde et mis la pression sur les marques européennes et américaines pour qu'elles fassent en sorte que les conditions de salaires et de sécurité soient améliorées.

Des groupes tels que Walmart et H&M se sont engagés à s'assurer des conditions prévalant dans les usines de leurs fournisseurs. Ils ont embauché à cette fin des ingénieurs chargés de veiller au respect des normes de sécurité en matière d'incendie, de construction et d'alimentation électrique des installations.