Une jeune Indienne sourde et muette égarée pendant dix ans au Pakistan est revenue lundi dans son pays, mais cette histoire qui a inspiré un film à succès à Bollywood n'a pas eu l'épilogue attendu : elle n'a pas reconnu sa famille supposée.

La jeune femme, baptisée Geeta par l'organisation caritative qui l'avait recueillie au Pakistan, est arrivée tout sourire à l'aéroport de New Delhi, où elle a été accueillie avec des bouquets de fleurs.

Elle espérait retrouver ce qu'elle pensait être sa famille perdue, qu'elle avait en partie identifiée au début du mois sur des photos fournies par des responsables indiens au Pakistan.

Mais l'heureux dénouement attendu n'a pas eu lieu : quelques heures après son arrivée à Delhi, Geeta a déclaré à des responsables locaux qu'elle ne connaissait pas la famille en question, les Mahato, originaires de l'État oriental du Bihar.

«Lorsqu'elle a rencontré les Mahato aujourd'hui, elle ne les a pas reconnus», a déclaré la ministre indienne des Affaires étrangères, Sushma Swaraj, au cours d'une conférence de presse donnée aux côtés de la jeune fille.

Geeta y est apparue optimiste malgré sa déception. «Elle était triste au Pakistan, et elle est heureuse d'être revenue ici», a expliqué son interprète en langage des signes.

Son histoire est suivie de près par les frères ennemis indien et pakistanais, qui ont mis de côté leurs tensions bilatérales récurrentes pour collaborer sur ce dossier.

Mme Swaraj a précisé que Geeta serait placée dans une institution spécialisée si les résultats des tests ADN confirmaient que la famille Mahato n'était pas la sienne, et que les recherches se poursuivraient pour retrouver les siens. «La famille et Geeta ont fourni des échantillons sanguins. Nous ne la rendrons à aucune famille sans preuves scientifiques», a-t-elle ajouté.

Geeta n'avait que 11 ou 12 ans lorsqu'elle a traversé, à bord d'un train et probablement par inadvertance, l'une des frontières les plus militarisées du monde, passant de son Inde natale au Pakistan.

Bollywood à la rescousse

Seule et désorientée, elle a finalement été recueillie à Karachi, la grande ville du sud du Pakistan, dans un foyer de la plus grande organisation caritative de ce pays, la fondation Edhi. Elle serait aujourd'hui âgée d'une vingtaine d'années.

Après dix ans de recherches, les choses se sont soudainement accélérées pour Geeta en août dernier lorsque Bollywood a porté à l'écran une odyssée symétrique à la sienne - une jeune Pakistanaise muette coincée en Inde - qui a caracolé en tête du box-office.

Geeta s'est retrouvée sous les projecteurs, et le gouvernement indien s'est engagé à la faire rentrer chez elle.

Après nombre de faux espoirs, elle avait finalement identifié sur des photos une famille de l'État du Bihar comme étant la sienne.

«C'est mon père, et mon jeune frère», avait-elle indiqué à l'AFP cette semaine à Karachi, montrant du doigt un cliché encadré, qu'elle garde précieusement.

S'exprimant dans un mélange de langage des signes et d'expressions faciales, elle était confiante, ne semblant avoir aucun doute sur le fait que cette famille était bien la sienne.

Mais des doutes demeuraient sur ce point, la famille qu'elle avait reconnue assurant notamment que sa fille perdue était mariée et avait un enfant lorsqu'elle avait disparu, alors que Geeta n'avait que 11 ou 12 ans à l'époque.

Vendredi, les autorités indiennes avaient rejeté les critiques sur un retour hâtif, assurant qu'en cas de tests ADN négatifs, Geeta serait accueillie dans une «institution adaptée».

La jeune fille avait avant son départ rempli ses trois valises de cadeaux pour ses proches supposés : des bracelets en verre pour sa belle-mère, des fruits secs pour ses frères, et des vêtements. Ainsi qu'une longue jupe turquoise et une tunique écarlate qu'elle prévoit de porter pour diwali, la fête hindoue célébrée en novembre.