Le Japon a jugé samedi «extrêmement regrettable» l'inscription sur le Registre de la mémoire du monde de l'UNESCO de documents relatifs au massacre de Nankin et a appelé à une réforme générale de ce registre qu'il accuse d'être utilisé à des fins politiques.

Les documents relatifs au massacre de Nankin, une vague d'atrocités commise par l'armée impériale japonaise en 1937 en Chine, sont désormais inscrits sur ce Registre de l'UNESCO, avait annoncé vendredi l'organisation onusienne.

«Il est extrêmement regrettable qu'une organisation internationale, qui devrait être neutre et juste, fasse entrer ces documents» dans le Registre «malgré les appels répétés du gouvernement japonais», a déclaré le ministère japonais des Affaires étrangères dans un communiqué.

«En tant que membre responsable de l'UNESCO, le gouvernement japonais va demander une réforme de ce projet important pour qu'il ne soit pas utilisé à des fins politiques», poursuit le ministère.

«La demande d'inscription a été faite sur la base de déclarations unilatérales de la Chine et le Japon considère que ces documents sont incomplets et présentent des problèmes d'authenticité», affirme le communiqué.

La décision, au terme d'un processus qui a duré deux ans, a été prise lors d'une réunion d'un comité consultatif international de l'UNESCO qui s'est tenue de dimanche à mardi aux Émirats arabes unis.

Chargé d'examiner des propositions d'inscription au patrimoine documentaire de l'humanité émanant de 40 pays, ce comité a ainsi décidé de 47 nouvelles inscriptions.

Pékin a vivement rejeté la réaction de Tokyo: «Le massacre de Nankin est un crime grave commis par le militarisme japonais pendant la Deuxième Guerre mondiale et un fait historique reconnu par la communauté internationale», a déclaré la porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères, Hua Chunying, selon l'agence officielle Chine nouvelle.

«Les faits ne doivent pas être niés et l'histoire réécrite», a-t-elle ajouté.

Le massacre de Nankin, comme les autres exactions perpétrées par les militaires nippons en Asie continentale avant et pendant la Seconde Guerre mondiale, est l'objet de tensions récurrentes entre Pékin et Tokyo.

La prise de Nankin, alors capitale de la République de Chine, avait donné lieu en décembre 1937 à une vague de meurtres, viols et pillages par les troupes japonaises.

La Chine chiffre à 300 000 le nombre des morts imputables aux militaires nippons durant les six semaines qui ont suivi leur entrée dans la ville, un nombre affiché partout dans le mémorial consacré à la tuerie, où sont notamment exposés les ossements de victimes. Selon des universitaires étrangers, le nombre de victimes serait moins élevé.

Les autorités chinoises accusent le Japon de refuser d'accomplir un travail de mémoire douloureux sur les atrocités commises par son armée.

Au printemps, l'approbation par Tokyo de nouveaux manuels scolaires japonais évitant notamment le mot «massacre» pour décrire les tueries de Nankin avait suscité la colère de Pékin.

Le Registre de la mémoire du monde de l'UNESCO comprend désormais un total de 348 documents et archives de tous les continents, allant de la pierre ou des parchemins aux enregistrements sonores, selon l'UNESCO.

«Le programme Mémoire du monde est guidé dans ses travaux par la volonté de préserver le patrimoine et la mémoire documentaire pour les générations actuelles et à venir, dans un esprit de coopération internationale et de compréhension mutuelle», a souligné la directrice générale de l'UNESCO, Irina Bokova, dans un communiqué.