Trafic humain, femmes en situation de vulnérabilité, travailleurs empêchés de rentrer, le séisme de 7,8 à l'échelle de Richter qui a secoué le Népal en avril aurait eu son lot de conséquences sur les droits de la personne et un grand impact sur le travail de ceux qui les défendent. La Presse a rencontré trois militants népalais qui participent actuellement à une formation, à Montréal.

Pendant que les autorités népalaises avaient les yeux tournés vers les victimes du tremblement de terre et ses conséquences désastreuses, certains en ont profité pour exécuter de basses besognes.

«C'est [dans les 14 districts touchés par le séisme] qu'on a enregistré le plus grand nombre de cas de trafic humain, affirme Nir Lama. Les trafiquants sont plus actifs maintenant.»

Cet ancien professeur d'anglais de 30 ans, qui travaille pour un organisme qui recense les violations des droits de la personne, au Népal, avait d'abord mis son réseau d'observateurs sur le terrain à contribution pour suivre la distribution de l'aide.

Il a cependant vite constaté que le séisme faisait aussi de nouvelles victimes des réseaux clandestins qui envoient femmes et enfants sur le chemin de l'esclavage sexuel en Inde, en Chine et en Afrique. «[Ces réseaux] ont tiré avantage de la situation.»

Le tremblement de terre «a accentué les problèmes» du Népal et rendu les femmes «plus vulnérables», ajoute Rhada Paudel, qui dirige l'organisation Action Works, qu'elle a fondée en 2010.

La petite femme de 41 ans au regard perçant se bat notamment contre le chhaupadi, cette tradition qui impose diverses restrictions aux femmes durant leurs menstruations et au moment de l'accouchement: interdiction d'entrer dans la maison, de participer à des activités sociales et de manger certains aliments.

«Avec le tremblement de terre, les femmes [ayant leurs règles ou venant d'accoucher] ont encore moins d'espace pour faire leur toilette, alors elles doivent aller dans les buissons», déplore-t-elle, ajoutant que celles qui ont un nouveau-né dans les bras ont le même problème.

Face à la destruction, le Népal a maintenant un besoin aigu de ses nombreux travailleurs partis gagner leur vie dans des chantiers à l'étranger, en raison du chômage élevé chez eux. Or, les entreprises qui les emploient ne les laissent pas toujours partir, explique l'avocat Nirmal Kumar Upreti, âgé de 31 ans, qui appuie les travailleurs migrants dans leurs démarches.

«Les entreprises d'Arabie saoudite, du Qatar et de Dubaï aident leurs travailleurs à rentrer à la maison, mais en Malaisie, par exemple, elles sont très restrictives.»



Du Népal à Haïti

Ces trois militants népalais participent au 36e Programme international d'éducation aux droits humains de l'organisation québécoise Equitas, qui réunit jusqu'au 26 juin à Montréal quelque 80 participants de 45 pays.

«C'est la pièce angulaire de notre travail à l'étranger», explique Ian Hamilton, directeur général d'Equitas, précisant que l'événement vise à outiller les défenseurs des droits de la personne en leur faisant partager leurs expériences respectives et en améliorant leurs notions de droit.

Sur place, ils feront la connaissance du militant haïtien Patrick Camille, ancien participant devenu animateur, qui en a long à dire sur la défense des droits fondamentaux après un séisme majeur.

Après que 1,5 million de personnes se sont subitement retrouvées à la rue, en 2010, les questions de logement sont vite devenues une préoccupation aiguë, de même que «la violence faite aux femmes et aux filles, dans les camps [où l'aide], parfois, était marchandée contre des faveurs sexuelles», se rappelle-t-il.

Son principal conseil pour ses confrères népalais? «Monter des observatoires pour voir comment l'aide internationale est gérée, comment le gouvernement népalais, par exemple, reçoit et redistribue l'aide qui est donnée.»

PHOTO ÉDOUARD PLANTE-FRÉCHETTE, LA PRESSE

Patrick Camille