De nouvelles manifestations de chrétiens ont tourné à la violence lundi dans les rues de Lahore (est) au lendemain d'un double attentat-suicide des talibans contre deux églises qui a fait 17 morts et des dizaines de blessés dans cette ville, la deuxième plus peuplée du Pakistan.

L'attaque talibane, perpétrée à la sortie de deux églises du quartier de Youhanabad, avait déclenché dimanche de rares violences chez des chrétiens de Lahore qui avaient lynché deux hommes soupçonnés d'être liés aux kamikazes, saccagé des voitures et des arrêts d'autobus.

Lundi, plus de mille policiers étaient déployés dans ce quartier, pour de nouvelles manifestations, des chrétiens marchant avec des pancartes aux slogans-chocs comme «Pourquoi nous tuez-vous», «Laissez-nous vivre» et «Arrêtez de tuer des chrétiens».

«Nous sommes dans la rue pour demander justice et protection», a déclaré à l'AFP Maqbool Bhatti, un manifestant. «Il n'y avait aucune sécurité dimanche, le gouvernement devrait protéger toutes les églises du pays», s'est-il indigné, alors que les autorités ont annoncé que le bilan du double attentat était passé de 14 à 17 morts.

Cette marche réunissant des milliers de chrétiens a donné lieu l'après-midi à des accrochages musclés entre manifestants munis de bâtons et policiers. «Nous tentons de rester pacifiques», a déclaré la porte-parole de la police du Pendjab, Nabeela Ghazanfar.

Selon un haut responsable de l'hôpital général de Lahore, le Dr Tariq Butt, douze personnes ont été blessées dans ces manifestations tandis qu'une autre a perdu la vie après avoir été renversée par une voiture quittant les lieux. Des manifestants ont aussi bloqué des routes dans d'autres grandes villes de la province du Pendjab, dont Lahore est la capitale.

«Cibles vulnérables»

Les chrétiens pakistanais, souvent relégués aux tâches ingrates, forment environ 2 % de la population de ce pays de près de 200 millions d'habitants, majoritairement musulmans.

Des cérémonies en hommage aux victimes ont eu lieu lundi au lendemain de cette attaque, la plus meurtrière perpétrée contre les chrétiens du Pakistan depuis celle de septembre 2013 contre une église de Peshawar (nord-ouest), qui avait fait 82 morts.

Le pape François a vivement condamné l'attaque des talibans pakistanais contre ces deux églises. «Nos frères chrétiens versent leur sang seulement parce qu'ils sont chrétiens», a-t-il déclaré.

Pour le ministre pakistanais de l'Intérieur, Chaudhry Nisar, ce double attentat témoigne de la «frustration» des insurgés islamistes, dont les capacités ont, selon lui, été mises à mal par les récentes offensives de l'armée.

«Ils s'attaquent maintenant aux cibles les plus vulnérables: les églises, les mosquées et les écoles», a déclaré le ministre lors d'une conférence de presse. Les talibans pakistanais avaient revendiqué le raid en décembre dernier contre une école de Peshawar qui avait fait 154 morts, dont plus de 130 écoliers.