Le survivant d'un camp de Corée du Nord dont l'histoire a été racontée dans un best-seller a reconnu que certaines parties de son récit étaient contraires à la réalité, ajoutant qu'il envisageait de mettre fin à ses activités de militant des droits de l'Homme.

Shin Dong-hyuk, 32 ans, s'est excusé dimanche sur sa page Facebook, déclarant qu'il avait «voulu cacher et masquer une partie de (son) passé».

Shin est la seule personne connue à être née dans un camp nord-coréen et à avoir réussi à s'en évader. Il a raconté son histoire dans un livre publié par le journaliste Blaine Harden et intitulé Rescapé du camp 14. Il y relate avoir subi tortures et travaux forcés avant sa fuite en 2005.

Depuis, ce survivant du goulag n'a eu de cesse de faire campagne contre les abus des droits de l'Homme commis en Corée du Nord, l'un des pays les plus hermétiques du monde, apportant son témoignage à une commission de l'ONU.

Récemment toutefois, il a modifié certains détails de son récit, a expliqué sur son site Blaine Harden.  «Le vendredi 16 janvier, j'ai appris que Shin (...) avait livré à des amis une version de sa vie significativement différente de celle figurant dans mon livre», écrit le journaliste. «J'ai contacté Shin, je lui ai demandé des explications sur les modifications et sur les raisons pour lesquelles il m'avait induit en erreur».

D'après le Washington Post, le Nord-Coréen a expliqué au journaliste que certaines des épreuves subies étaient «trop douloureuses» pour qu'il revienne dessus. Il a aussi dit qu'il avait «modifié certains détails» dont il ne pensait pas qu'ils avaient de l'importance.

«Je voulais cacher et masquer pour toujours une partie de mon passé», écrit-il sur Facebook. «On se dit qu'il est acceptable de ne pas révéler le moindre petit détail, et que cela ne fait rien si certaines parties ne sont pas claires. À ceux qui m'ont soutenu, qui m'ont fait confiance et qui m'ont cru pendant tout ce temps, je suis tellement reconnaissant et en même temps tellement désolé».

Dans le livre, Shin dit qu'il avait été torturé et brûlé à l'âge de 13 ans en tentant de s'évader. D'après le Washington Post, ces faits se seraient produits à 20 ans.

Shin raconte aussi avoir trahi sa mère et son frère en dénonçant leur projet d'évasion dans l'espoir d'obtenir de la nourriture, et avoir assisté à leur exécution. Le journal dit que celles-ci ont eu lieu en son absence.

Lee Young-Hwan, spécialiste des droits de l'Homme basé à Séoul, estime qu'il s'agit «d'inexactitudes mineures». De nombreux réfugiés qui ont connu des abus ont une «mémoire sélective» en raison du traumatisme subi et de l'instinct de préservation qu'ils développent durant les années d'épreuve, dit-il.

«Ce traumatisme peut parfois les conduire à ne raconter que des choses qui les placent sous un jour favorable, ou à avoir des souvenirs embrouillés des expériences les plus douloureuses», a-t-il expliqué. «Il y a peut-être des inexactitudes mineures dans le récit de Shin, mais toute sa vie et le cauchemar qu'il a subi sont quand même des preuves historiques».

Shin dit dans son message qu'il ne pourra peut-être pas continuer à militer, appelant ses soutiens à poursuivre le combat contre les abus commis en Corée du Nord, dirigée d'une main de fer par ce qui est considéré comme la seule dynastie communiste de l'histoire. «Le monde a quand même besoin d'être informé des horreurs innommables qui se passent».