Le président sortant du Sri Lanka Mahinda Rajapakse a reconnu sa défaite vendredi à l'élection présidentielle, à l'issue d'une campagne âprement disputée qui a vu le chef de l'Etat être accusé de corruption et d'avoir échoué à sceller la réconciliation nationale.

Après le scrutin le plus serré que le Sri Lanka ait connu depuis des décennies, le chargé de presse du président sortant a déclaré que celui-ci acceptait la décision des électeurs.

Mahinda Rajapakse, qui briguait un troisième mandat, «a déclaré qu'il s'inclinait devant la volonté du peuple exprimée lors du vote de jeudi et qu'il assurerait une transition en douceur du pouvoir», a déclaré à l'AFP Vijayananda Herath.

Les résultats préliminaires donnent à son ancien ministre de la Santé, Maithripala Sirisena, passé à l'opposition, une avance sans appel, selon des sources officielles. Celui-ci a remporté 52,49% des suffrages devant M. Rajapakse, qui recueille 46,21% des voix, après le décompte de près de 30% des bulletins de vote.

«Le président a constaté qu'il y a avait une nette majorité en faveur du candidat de l'opposition et il n'y a aucun moyen de rattraper la situation», a expliqué l'entourage du chef de l'Etat sortant, qui était le plus ancien dirigeant d'Asie du sud.

D'après le chargé de presse, le président sortant a concédé sa défaite lors d'un entretien avec Ranil Wickremesinghe, chef de l'opposition parlementaire et qui devrait être choisi comme nouveau Premier ministre par M. Sirisena.

Un député d'opposition, Harsha de Sivla, a déclaré que la sécurité du président sortant serait assurée et que des arrangements étaient en cours en vue de la passation des pouvoirs.

Lorsqu'il avait annoncé en novembre ce scrutin anticipé, M. Rajapakse semblait assuré de l'emporter, cinq ans après l'écrasement de la rébellion tamoule qui a traumatisé le pays pendant des décennies.

Autoritarisme

Fort de la victoire militaire face aux Tigres tamouls en 2009, il avait remporté peu après en 2010 une victoire électorale triomphale. Mais il n'a pas été capable ensuite de sceller la réconciliation avec la minorité tamoule, d'après ses détracteurs.

Son deuxième mandat a en outre été terni par des accusations de corruption ayant miné l'indépendance de la justice, et des soupçons d'enrichissement illicite de responsables politiques proches de lui.

Accusé d'autoritarisme, Rajapakse avait levé la limite de deux mandats présidentiels et s'était arrogé de nouvelles attributions. Pour tenter de renforcer sa popularité, il avait pris des mesures spectaculaires, comme la réduction des prix de l'essence, des tarifs de l'électricité et de l'eau, et la hausse des salaires de 1,6 million de fonctionnaires.

Mais la défection surprise de son ministre de la Santé avait galvanisé l'opposition, donnant lieu à une campagne acharnée et sans concession.

Jusque là, le ministre de la Santé était assez méconnu. Les partis d'opposition, dont le principal parti tamoul, s'étaient ainsi ralliés à cet agriculteur de 63 ans reconverti à la politique, originaire de la majorité cinghalaise.

«Sirisena est devenu le symbole des partisans d'une meilleure gouvernance et de l'anti-corruption», a dit Paikiasothy Saravanamuttu, directeur du Centre pour des politiques alternatives, un centre de recherches.

Des observateurs indépendants avaient été déployés pour décourager les tentatives d'intimidation, en particulier dans le nord à forte composante tamoule, et Washington avait exhorté à la tenue d'une élection pacifique et loyale.

Le Sri Lanka a connu une croissance moyenne annuelle de plus de 7% depuis la fin de la guerre, en partie grâce aux investissements de la Chine, proche allié du président.

Mais l'opposition faisait valoir que les groupes chinois employaient peu de Sri-Lankais et que les revenus des ménages n'avaient pas suivi le rythme de la croissance.

L'élection survient avant une visite dans le pays du pape François à partir du 13 janvier, qui devrait être centrée sur la réconciliation.