Les parlementaires pakistanais ont approuvé mardi la création de tribunaux militaires pour accélérer les procédures dans les affaires de terrorisme en réponse à l'attaque la plus meurtrière de l'histoire du pays, perpétrée à la mi-décembre par un commando taliban dans une école de Peshawar.

Cette attaque, qui a fait 150 morts dont une majorité d'écoliers, a profondément choqué la population du Pakistan, géant musulman de près de 200 millions d'habitants qui est miné depuis huit ans par les attaques à répétition des talibans locaux en lutte contre le pouvoir d'Islamabad accusé de soutenir la guerre américaine contre le terrorisme.

À la suite de cette attaque, l'armée a intensifié ses raids contre des refuges talibans du nord-ouest du pays, près de la frontière afghane. Le gouvernement a par ailleurs levé son moratoire, en vigueur depuis 2008, sur la peine de mort dans les cas de terrorisme, une décision critiquée par plusieurs organisations de défense des droits de l'homme et par l'Union européenne.

Le premier ministre Nawaz Sharif avait aussi annoncé son intention d'amender la constitution afin de créer, pour une période de deux ans, des tribunaux militaires antiterroristes.

Tout changement constitutionnel au Pakistan exige un vote des deux tiers de l'Assemblée nationale, soit au moins 228 des 342 députés. Mardi, 247 députés ont voté en faveur du 21e amendement à la constitution autorisant la création de ces tribunaux antiterroristes.

Certains députés du Parti de la Justice (PTI) de l'ex-gloire du cricket Imran Khan ne se sont pas présentés en chambre, alors que les deux grands partis islamistes du pays, la Jamaat-e-Islami et la Jamaat Ulema-e-Islam du mollah Fazlur Rehman (JUI-F), se sont abstenus lors du vote.

Outre ces voix discordantes chez les partis islamistes, certains progressistes ont critiqué la création de ces tribunaux, le grand quotidien Dawn évoquant ce weekend dans un éditorial une «journée triste» pour le pays.

«Oui, nous avons besoin d'une stratégie cohérente pour combattre les insurgés, que les chefs politiques et militaires travaillent ensemble. Mais les tribunaux militaires ne sont pas la solution», souligne le journal, qui voit dans cet amendement la preuve de la préséance de l'armée sur le politique, voire une «traitrise» envers la démocratie, dans un pays dirigé pendant trois décennies par les militaires depuis sa création en 1947.

Après le vote des députés, le 21e amendement doit encore être entériné mercredi par le Sénat ce qui ne devrait être qu'une formalité compte tenu de la composition de la chambre haute, contrôlée par des partis favorables à ces tribunaux.