Dans la rue depuis un mois, les manifestants prodémocratie de Hong Kong devaient voter dimanche et lundi pour choisir entre la voie de la confrontation et celle du compromis, mais ils ont finalement renoncé, reconnaissant des divisions dans leurs rangs.

Le vote par téléphone portable devait se tenir dimanche soir et lundi soir sur les trois sites occupés par les manifestants dans les quartiers commerçants de Causeway Bay et Mongkok, et à Admiralty, près du siège du gouvernement.

L'organisation Occupy Central a finalement annoncé dans un communiqué le report de la consultation en raison «d'opinions très diverses sur les modalités de (son) organisation».

«Nous avons décidé de reporter le vote (...), mais cela ne signifie pas que le mouvement soit arrêté», a lancé Benny Tai, un chef de file du mouvement, au cours d'une conférence de presse.

«Il y a eu beaucoup de conflits et d'opinions contradictoires», a reconnu le leader étudiant Alex Chow. Les meneurs des manifestations craignaient également une infiltration des opposants qui auraient pu prendre part au vote.

Territoire chinois bénéficiant d'une large autonomie, l'ancienne colonie britannique connaît sa plus grave crise politique depuis sa rétrocession à Pékin en 1997.

Des dizaines de milliers de manifestants regroupés sous la bannière du mouvement Occupy Central bloquent depuis le 28 septembre d'importantes artères de la ville, perturbant les transports et l'activité économique.

Ils exigent l'instauration du suffrage universel plein et entier lors de l'élection du prochain chef de l'exécutif local en 2017.

Le 31 août, le comité permanent de l'Assemblée nationale populaire (ANP - Parlement) chinoise a approuvé le principe «une voix, un vote», mais réservé à un comité de grands électeurs majoritairement favorable au Parti communiste chinois (PCC) le soin de présélectionner les candidats, comme c'est déjà le cas actuellement.

À Hong Kong, la mobilisation a faibli au gré des heurts entre les manifestants d'un côté, la police et des contre-manifestants de l'autre, et les chefs de file de la contestation peinent à relancer la dynamique.

Manque de clarté au sommet

D'autant que le gouvernement a proposé de soumettre à Pékin un projet de «démocratisation» du comité de sélection électoral qui pourrait tenter les partisans d'un compromis.

Occupy Central avait donc décidé de procéder à un vote tout en insistant sur le fait qu'il ne pouvait déboucher sur un retrait des manifestants et qu'il constituait au contraire «un moyen de pression».

Deux questions devaient être posées: Faut-il continuer à exiger de l'ANP qu'elle revienne sur sa décision de censurer les candidatures? Faut-il exiger comme préalable à toute discussion avec le gouvernement local le principe des candidatures libres dès 2017?

Grèves et manifestations sont rares à Hong Kong et le mouvement prodémocratie, dont les étudiants forment la force la plus active, semble en partie victime de son amateurisme. La stratégie des manifestants face au gouvernement local - qui, selon ses détracteurs, est aux ordres de Pékin - s'est souvent révélée fluctuante.

Plusieurs milliers de personnes ont participé samedi à une contre-manifestation demandant la fin des occupations. Les organisateurs affirment avoir recueilli 320 000 signatures de Hongkongais réclamant le départ des manifestants.

Quatre journalistes ont été malmenés lors de ce rassemblement. Les autorités ont condamné «un acte sauvage» et annoncé l'ouverture d'une enquête.

Pour Surya Deva, professeur de droit à la City University de Hong Kong, les divisions affichées dimanche trahissent «le manque de clarté» stratégique au sommet.

«C'est l'inconvénient de tout mouvement décentralisé», a-t-il indiqué à l'AFP au sujet du «mouvement des parapluies», constellation de parlementaires, de syndicats étudiants, d'associations et d'anonymes.

Un comité de l'ONU, réuni à Genève, a instamment demandé jeudi à Hong Kong d'engager des réformes démocratiques, jusqu'à présent insuffisantes, constatant «l'absence d'un plan clair pour mettre en oeuvre un suffrage universel».