La tension est remontée d'un cran lundi à Hong Kong où des manifestants prodémocratie se sont heurtés à des dizaines d'hommes masqués qui ont fait irruption sur une grande avenue occupée depuis quinze jours près du siège du gouvernement.

Les heurts se sont produits à la mi-journée lorsque des hommes très déterminés, portant des masques chirurgicaux pour ne pas être identifiés, ont tenté de forcer et de démanteler l'un des principaux barrages bloquant le quartier d'Admiralty.

Deux d'entre eux ont été plaqués au sol par des policiers qui ont aussi formé un cordon pour contenir les autres, conspués par les manifestants aux cris de «Arrêtez les triades», en référence aux hommes de main de la mafia chinoise soupçonnés d'avoir provoqué des violences sur les sites occupés.

Trois personnes ont été arrêtées pour violences et port d'armes.

Interrogé par l'AFP, le député du Parti démocratique Albert Ho a dénoncé le fait des «triades ou de voyous progouvernement». «Il semble que la police ait enlevé certaines barricades pour permettre aux triades d'atteindre les manifestants pacifiques», a renchéri Claudia Mo, élue du Parti civique.

Des violences de même nature avaient émaillé les manifestations il y a 10 jours dans le quartier commerçant de Mongkok, sur la partie continentale de Hong Kong. 19 personnes avaient été arrêtées, dont huit sont liées aux triades, selon la police.

Dès l'aube, des centaines de policiers avaient dégagé certaines voies de circulation à Admiralty et à Mongkok, profitant du fait que peu de manifestants avaient passé la nuit sur place.

Certains manifestants répondaient aux mouvements des forces de l'ordre en agitant des parapluies, un accessoire indispensable à Hong Kong pour se protéger du soleil ou de la pluie, et devenu l'emblème de ces manifestations.

Répression des dissidents chinois

Malgré les nombreuses injonctions des autorités de se disperser, les manifestants se sont installés dans la durée, en montant des tentes, des douches mobiles ou en organisant des soirées de débats, attirant des milliers de personnes ces derniers jours.

«Nous n'allons rien faire contre la police [...] nous voulons juste tenir nos postes avancés», assurait Annabel Wong. «C'est la dernière ligne de défense du peuple près des bâtiments du gouvernement. Je suis prête à me faire arrêter», a lancé cette étudiante de 22 ans.

Les contre-manifestants se sont dispersés dans la journée et les manifestants ont reconstruit une partie des barricades au moyen de palettes de bois et de tiges de bambou.

Bravant la tutelle chinoise, les manifestants exigent de pouvoir librement élire le prochain chef de l'exécutif hongkongais en 2017, alors que le Parti communiste chinois (PCC), craignant une contagion revendicative sur son territoire, entend garder la haute main sur le processus électoral.

En août, le comité permanent de l'Assemblée nationale populaire (ANP - Parlement) a entériné le principe «un vote, une voix» tout en conservant le contrôle des candidatures au scrutin.

Les blocages en place depuis le 28 septembre ont fortement perturbé l'activité à Hong Kong et la vie quotidienne des plus de sept millions d'habitants de ce territoire semi-autonome enclavé à l'extrême sud de la Chine, qui connaît sa plus grave crise politique depuis sa rétrocession à la Chine en 1997.

Dimanche, le chef de l'exécutif local, Leung Chun-ying, considéré comme une marionnette de Pékin par les manifestants, a déclaré à la télévision que le mouvement prodémocratie n'avait «presque aucune chance» d'infléchir la position de la Chine.

Selon Chinese Human Rights Defenders, ONG basée aux États-Unis, plus de 40 personnes ont été arrêtées en Chine ces deux dernières semaines pour avoir exprimé leur soutien au récent mouvement prodémocratique à Hong Kong.

Deux militantes pékinoises ont été par ailleurs arrêtées la semaine dernière pour avoir pris part à une marche prodémocratie à Hong Kong en juillet.

Ces arrestations interviennent alors que Pékin a fortement durci la censure de l'internet ces derniers mois, multipliant les arrestations de blogueurs et de voix critiques, sous couvert de combattre les «rumeurs» sur les réseaux sociaux.