Le chef de l'exécutif hongkongais, sommé par les manifestants prodémocratie de démissionner, leur a opposé jeudi une fin de non-recevoir tout en présentant une offre de dialogue aux étudiants qui représentent la majorité des protestataires.

«Je ne démissionnerai pas parce je dois continuer à travailler sur (la réforme) électorale» au centre de la confrontation, a déclaré Leung Chun-ying au cours d'une conférence de presse convoquée dans sa résidence officielle quelques minutes avant l'expiration d'un ultimatum destiné à obtenir sa démission.

Leung Chun-ying, perçu par les protestataires comme l'homme de main de Pékin à Hong Kong, s'est exprimé à partir de 23 h 30 (11h30 à Montréal) depuis sa résidence officielle.

Son intervention précédait de 30 minutes l'expiration de l'ultimatum des leaders étudiants du mouvement prodémocratie qui lui avaient donné jusqu'à minuit pour démissionner en menaçant d'intensifier leurs actions et d'envahir les bâtiments gouvernementaux.

La tension est brusquement montée jeudi soir à Hong Kong après l'avertissement lancé par les autorités aux manifestants, sommés de se disperser, et le transport par la police de caisses de balles en caoutchouc qui faisait craindre un épilogue violent.

Aux leaders étudiants de la «révolution des parapluies» qui exigent la démission du chef de l'exécutif avant minuit, le gouvernement a répondu par la fermeté et lancé un appel à la fin du mouvement qui sonne comme un ultime avertissement.

«Le gouvernement et la police appellent ceux qui sont rassemblés aux abords du quartier général de la police, du CGO (siège du gouvernement) et du CEO (bureaux du chef de l'exécutif) de ne plus bloquer leur accès et de se disperser pacifiquement le plus tôt possible», indique un communiqué officiel.

Les manifestants, qui réclament l'instauration du suffrage universel plein et entier, font depuis cinq jours le siège des administrations gouvernementales entre les quartiers d'Admiralty et de Central, bloquant routes et carrefours. L'activité économique et la circulation des biens et des personnes sont fortement perturbées. Le gouvernement a exhorté à maintes reprises les manifestants de mettre un terme à leur blocus.

Dimanche, les policiers avaient fait usage de gaz lacrymogène et de gaz au poivre pour tenter de les déloger et les images de jeunes manifestants face à l'assaut de la police antiémeute avaient ému tant à Hong Kong qu'à l'étranger.

Caisses de balles en caoutchouc

Les autorités semblent vouloir éviter une nouvelle confrontation, mais les manifestants refusent de leur côté la moindre concession tant que le chef de l'exécutif, Leung Chun-yin, perçu comme la marionnette du Parti communiste chinois (PCC), reste en place.

De brèves échauffourées ont éclaté jeudi après-midi lorsque des manifestants ont vu des policiers décharger des caisses en bois et des fûts en métal. Sur des images abondamment relayées par les internautes, on peut lire sur les caisses: «Round, 38 mm rubber baton multi», ce qui désigne sans équivoque des balles en caoutchouc. Sur un fût, les lettres «CS» laissent penser à des projectiles de gaz lacrymogène, parfois désigné en anglais d'après les initiales de ses inventeurs.

«C.Y», comme est surnommé à Hong Kong le chef de l'exécutif, semble d'autant moins enclin à négocier que Pékin lui a de nouveau apporté son soutien «ferme et intangible» par la voix du Quotidien du peuple, organe du Parti communiste au pouvoir.

Les manifestants sont vent debout contre la décision de Pékin, annoncée en août, d'accorder le suffrage universel pour l'élection du chef de l'exécutif en 2017 tout en gardant le contrôle des candidatures. Cette décision rompt, selon eux, avec les engagements pris par Pékin lors de la rétrocession de Hong Kong à la Chine en 1997 après 150 ans de présence britannique.

PHOTO WONG MAYE-E, AP

Sur un fût, les lettres «CS» laissent penser à des projectiles de gaz lacrymogène, parfois désigné en anglais d'après les initiales de ses inventeurs.

PHOTO WONG MAYE-E, AP

Des policiers ont déchargé du matériel qui semble destiné à contenir des émeutiers, dont des caisses en bois et des fûts en métal. On peut lire sur les caisses: «Round, 38 mm rubber baton multi».

Mise en garde de la police

Face à la fermeté du gouvernement, des leaders étudiants ont donné jusqu'à la fin de la journée à «C.Y» pour remettre sa démission, en menaçant d'intensifier leurs actions et d'envahir les bâtiments gouvernementaux.

La police les a mis en garde, affirmant qu'elle ne «tolèrera pas» qu'ils «encerclent les bâtiments gouvernementaux (...) entraînant un blocus total et nuisant gravement à la sécurité et à l'ordre publics».

Andrew Shum, membre de la principale coalition prodémocratie, a déclaré à l'AFP craindre que «la police ne recoure à la force pour disperser les manifestants ce soir» jeudi.

Tous ne sont pas d'accord toutefois avec les plus remontés des manifestants, redoutant de nouveaux affrontements. «Je pense que cela doit rester une révolution pacifique», a dit Janice Pang, une conceptrice de costumes. «Le peuple de Hong Kong pourrait ne pas nous soutenir si nous faisons quelque chose de plus extrême».

Sous forte pression médiatique et diplomatique, Pékin a prévenu Washington qu'il ne fallait pas se mêler de cette crise politique, la plus grave depuis la rétrocession.

«Les affaires de Hong Kong sont les affaires intérieures de la Chine», a lancé le chef de la diplomatie chinoise Wang Yi comme son homologue américain John Kerry le recevait à Washington.

La Chine marche sur les oeufs dans cette crise alors que le président Xi Jinping a resserré l'étau sur la dissidence et cherche par tous les moyens à se prémunir contre une contagion démocratique.

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De brèves échauffourées ont éclaté jeudi après-midi lorsque des manifestants ont vu des policiers décharger des caisses en bois et des tonneaux en métal. 

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Un étudiant lève les mains pour démontrer aux policiers qui lui font face que les manifestants n'ont aucune intention violente, à Hong Kong, le 2 octobre.