La justice a autorisé jeudi l'ancien général et président Pervez Musharraf à quitter le Pakistan d'ici deux semaines, ouvrant la voie à son possible nouvel exil et à la fin de ses ennuis judiciaires dans ce pays où l'armée reste puissante.

Le clan de M. Musharraf, 70 ans, qui dirigea le Pakistan de 1999 à 2008 et fut un allié proche des États-Unis dans leur «guerre contre le terrorisme», réclamait depuis plusieurs mois la levée de son interdiction de sortir du territoire.

Cette décision, contre laquelle le gouvernement peut toutefois faire appel, intervient alors que le pays reste fragile et sous tension, trois jours après le siège sanglant (37 morts) de l'aéroport de Karachi (sud), le plus important du pays, par un commando de rebelles islamistes talibans.

En réaction, l'armée pakistanaise et les drones américains ont bombardé ces derniers jours des bastions insurgés dans les zones tribales du nord-ouest, le long de la frontière afghane.

Poussé vers la sortie en 2008, Pervez Musharraf s'exila pendant cinq ans avant de revenir au Pakistan début 2013 et d'être rapidement rattrapé par la justice et interdit de quitter le pays.

Jeudi matin, un tribunal de Karachi a ordonné au gouvernement de retirer le nom de l'ancien dictateur militaire et chef de l'État de la liste des personnes interdite de sortir du territoire, où il avait été placé le 5 avril 2013.

La décision a été lue par le juge Muhammad Ali Mazhar, qui a indiqué avoir ainsi accédé à la demande des avocats de M. Musharraf. «Le jugement est exécutoire d'ici 15 jours» pour permettre au gouvernement fédéral de faire appel devant la Cour suprême» s'il le désire, a-t-il précisé.

«Le tribunal a accédé à notre requête et ordonné de retirer le nom de M. Musharraf de la liste de contrôle de sortie du territoire. Cette décision doit être exécutée après 15 jours», a confirmé à l'AFP l'avocat de M. Musharraf, Farogh Naseem.

En, avril dernier, l'ex-général pakistanais avait été inculpé par un tribunal d'exception de «haute trahison», une première dans l'histoire de ce pays marqué par une rivalité permanente entre le pouvoir civil et la puissante armée dont M. Musharraf est issu.

La justice soutient que l'accusé, arrivé au pouvoir par un coup d'État militaire en 1999, a «trahi» le pays lorsqu'il a imposé l'état d'urgence, suspendu la Constitution et limogé des juges en 2007. Il fut forcé à abandonner le pouvoir l'année suivante sous la pression de la justice et des partis politiques dominants.

Pervez Musharraf, qui a plaidé non coupable de ces accusations, se dit victime d'une vendetta lancée par ses rivaux politiques, notamment le premier ministre Nawaz Sharif, qu'il avait renversé en 1999 et qui a formé fin novembre le tribunal d'exception.

Peu après son inculpation, M. Musharraf avait échappé à l'explosion d'une bombe au passage de son convoi à Islamabad.

Pervez Musharraf, bête noire des rebelles talibans en raison de son alliance avec les États-Unis qui l'a conduit à traquer les insurgés islamistes sous son règne, avait déjà échappé auparavant à trois tentatives d'assassinat.

Son clan tentait depuis de convaincre le pouvoir politique et la justice d'autoriser son départ à l'étranger, en arguant notamment de ses problèmes de santé.

En avril, il avait quitté sa résidence proche d'Islamabad pour Karachi (sud), officiellement pour passer des tests médicaux, nourrissant les rumeurs d'un prochain départ du pays.

Outre le procès pour trahison, Pervez Musharraf est dans le collimateur de la justice pour son rôle présumé dans les meurtres de son ex-rivale Benazir Bhutto, du chef rebelle baloutche Akbar Bugti, et de l'assaut meurtrier de l'armée contre des islamistes retranchés dans la Mosquée rouge d'Islamabad.