Le mari de la Pakistanaise enceinte lapidée par sa propre famille a admis jeudi avoir assassiné sa première épouse, nouveau rebondissement dans un drame qui suscite une vague d'indignation.

Farzana Parveen, 25 ans, avait été tuée mardi à coups de briques par des membres de sa famille sous le regard impassible de policiers devant le tribunal de Lahore (est), capitale de la province du Penjab.

La famille de Farzana lui reprochait de l'avoir «déshonorée» en se mariant contre leur gré à Mohammad Iqbal, un agriculteur de 45 ans, dans ce pays où les unions sont le plus souvent arrangées.

Mais ce dernier a confessé jeudi avoir jadis assassiné sa première épouse, par «amour» pour Farzana, donnant à ce drame familial shakespearien une tournure aussi inattendue que macabre.

«J'étais amoureux de Farzana et c'est à cause de cet amour que j'ai tué ma première femme... par strangulation», a-t-il déclaré à l'AFP dans un entretien téléphonique.

Le fils du couple avait à l'époque porté plainte contre son père, mais l'avait ensuite pardonné en échange du versement du «prix du sang». Une fois pardonné, le père a recouvré sa liberté.

«Iqbal a tué sa première épouse il y a six ans. Il avait été arrêté, puis relâché après avoir trouvé un compromis avec sa famille», a confirmé à l'AFP Zulfiqar Hameed, un responsable de la police enquêtant sur le meurtre de la jeune Farzana.

En liberté, le meurtrier a convaincu Farzana de l'épouser, mais après un accord initial la famille de la jeune femme a exigé le versement d'une dot plus généreuse, ce que Mohammad Iqbal a refusé, selon ce dernier.

Le couple s'est marié malgré le refus final de la famille de Farzana qui s'est sentie «déshonorée» par la jeune femme, et non le mari.

Le PM exige des mesures urgentes

Le Premier ministre pakistanais Nawaz Sharif a demandé aux autorités de la province du Pendjab de «prendre des mesures immédiates» concernant ce crime «totalement inacceptable» survenu «devant la police».

Au Pakistan, près de 1000 femmes ou adolescentes ont été tuées l'an dernier pour avoir «déshonoré» leur famille, selon la Commission nationale des droits de l'homme, qui dénonce «l'impunité» dont jouissent les auteurs de ces meurtres.

Washington condamne un «meurtre haineux»

Les États-Unis ont condamné jeudi le «meurtre haineux». Le département d'État a déploré, dans un communiqué lu par sa porte-parole Jennifer Psaki, qu'il s'agisse d'«au moins le troisième soi-disant crime d'honneur (perpétré) au Pakistan cette semaine».

Le premier ministre Nawaz Sharif a demandé jeudi aux autorités provinciales de «prendre des mesures immédiates» concernant ce crime «totalement inacceptable» survenu «devant la police».

«Nous saluons les propos de hauts dignitaires pakistanais condamnant ce crime haineux et nous appelons à ce qu'on y réponde rapidement (...) en traduisant en justice ses auteurs», a dit Mme Psaki.

La diplomatie américaine a rappelé sa «grande préoccupation devant les violences infligées aux femmes et aux jeunes filles partout dans le monde, y compris au Pakistan».

«Nous sommes particulièrement inquiets d'une violence qui survient au nom de la tradition et de l'honneur, comme ce qu'on appelle les crimes d'honneur et autres actes violents injustifiables», a insisté la porte-parole américaine. Elle a toutefois salué «l'adoption par le Pakistan d'une législation protégeant le droit des femmes», demandant «sa mise en oeuvre complète (...) dans les régions rurales et tribales du Pakistan».

De fait, dans ce géant musulman d'Asie du Sud, des lois en vigueur depuis le début des années 2000 interdisent les mariages forcés et pénalisent les crimes d'honneur, mais se heurtent à des coutumes ancestrales ou à une interprétation rigoriste de l'islam.