Le gouvernement intérimaire thaïlandais a prévenu dimanche que la menace de l'opposition d'installer un cabinet non élu, après un ultimatum qui expire lundi, risquait de plonger le pays dans une nouvelle spirale de violences.

Dans la rue depuis six mois, les manifestants antigouvernementaux ne démordent pas de leur idée d'instaurer à la place du cabinet intérimaire un «conseil du peuple», non élu, responsable de «réformes» du système. Ils ont lancé un ultimatum qui expire lundi.

«Former un gouvernement non élu est illégitime et n'apporterait que plus de discorde et de violence», a estimé dimanche Tarit Pengdith, patron du Département des enquêtes spéciales (DSI) du ministère de la Justice.

Les autorités «renforceront les mesures de maintien de l'ordre pour résoudre le problème», a-t-il averti durant un point presse télévisé de ses services, chargés des opérations de sécurité depuis le début de la crise il y a six mois.

Des milliers de Chemises rouges, puissant mouvement progouvernemental, ont manifesté samedi à Bangkok pour mettre en garde leurs opposants contre une «guerre civile» en cas de chute du gouvernement intérimaire, après le limogeage de la première ministre.

Yingluck Shinawatra a été destituée mercredi par la Cour constitutionnelle, laquelle est accusée par les Chemises rouges et le parti Puea Thai au pouvoir de faire partie d'une «coalition des élites» royalistes.

«Les Chemises rouges ne peuvent pas accepter la nomination antidémocratique et anticonstitutionnelle d'un premier ministre», a déclaré devant ses partisans Jatuporn Prompan, chef de file du mouvement.

Le système politique thaïlandais est gangréné par la corruption, selon les manifestants, après des années de gouvernements pro-Thaksin, le frère de Yingluck Shinawatra.

Les manifestants ne reconnaissent pas le premier ministre par intérim et refusent les législatives prévues le 20 juillet. Ils réclament de facto la suspension des institutions démocratiques avant une élection dans 18 mois.

Thaksin Shinawatra avait été renversé par un coup d'État en 2006 et vit en exil pour fuir une condamnation pour malversations financières, un jugement politique selon lui.

Selon les analystes, les manifestants sont soutenus par les élites proches du Palais royal, qui considèrent le «clan Shinawatra», vainqueur de toutes les législatives depuis 2001, comme une menace pesant sur la monarchie. Le roi de Thaïlande est âgé de 86 ans.

La Thaïlande est profondément divisée. Les partisans des Shinawatra se comptent notamment parmi la population rurale du nord et du nord-est du pays, démographiquement majoritaire.

Les manifestants d'opposition sont essentiellement des membres de l'élite et de la classe moyenne de Bangkok et des habitants du sud de la Thaïlande, fiefs électoraux du Parti démocrate, principale formation d'opposition, qui n'a jamais réussi à séduire au-delà de son électorat traditionnel et perd toutes les élections nationales.