Les Îles Marshall veulent poursuivre neuf puissances nucléaires, dont les États-Unis, devant le plus haut organe judiciaire des Nations unies, les accusant de ne pas avoir abandonné «la course» à l'arme atomique, a annoncé vendredi la Cour internationale de Justice.

Théâtre de nombreux essais nucléaires dans les années 40 et 50, ce minuscule État du Pacifique a déposé jeudi devant la CIJ «des requêtes introductives d'instance contre neuf États différents», a indiqué la Cour dans un communiqué.

Les Îles Marshall accusent la Chine, la Corée du Nord, la France, l'Inde, Israël, le Pakistan, la Russie, le Royaume-Uni et les États-Unis «de ne pas s'acquitter de leurs obligations relatives à la cessation de la course aux armes nucléaires à une date rapprochée et au désarmement nucléaire».

La Cour a toutefois indiqué qu'elle n'avait admis que les plaintes contre le Royaume-Uni, le Pakistan et l'Inde, car ces trois nations ont accepté par le passé la «compétence obligatoire» de la CIJ.

Les autres plaintes ne seront examinées que si les gouvernements des pays visés donnent leur feu vert, ce qui est loin d'être sûr.

«Les Îles Marshall sont particulièrement conscientes des graves conséquences que peuvent avoir les armes nucléaires», a indiqué le gouvernement marshallais dans le document soumis devant la Cour.

Minuscule nation de 55 000 habitants dans le Pacifique Ouest, les Îles Marshall ont été le théâtre de 67 essais nucléaires américains entre 1946 et 1958, sur les atolls de Bikini et Enewetak.

Mille fois plus puissant qu'Hiroshima

Les Îles Marshall ont commémoré en mars le 60e anniversaire du tir Castle Bravo sur l'atoll de Bikini (1er mars 1954), le plus puissant essai nucléaire américain jamais réalisé et considéré comme mille fois plus puissant que la bombe atomique lâchée sur Hiroshima.

Il avait provoqué des radiations pour les habitants des Îles Marshall et entraîné la mort d'une quinzaine de pêcheurs japonais qui se trouvaient alors près de l'atoll.

Washington a déjà versé plus de 500 millions de dollars de compensation aux habitants de ces atolls, dont certains ont connu des problèmes de santé et/ou ont dû abandonner leur terre natale, mais l'archipel veut 2 milliards de dollars supplémentaires.

La France a pour sa part procédé à 196 essais nucléaires en Polynésie française, entre 1966 et 1996.

Les mesures nécessaires

L'État du Pacifique estime que les pays ayant signé le traité de 1968 sur la non-prolifération des armes nucléaires ne respectent pas leurs engagements.

Quant à la Corée du Nord, Israël, le Pakistan et l'Inde, qui n'ont pas signé ce traité, les Îles Marshall estiment qu'ils ne respectent pas le droit international coutumier découlant du traité.

Les Îles Marshall veulent que les neuf pays concernés prennent «toutes les mesures nécessaires» pour s'acquitter de ce que l'État du Pacifique estime être leurs obligations au regard du traité et du droit international coutumier.

Si huit des neuf pays visés détiennent officiellement l'arme atomique. Israël n'a jamais officiellement dit la détenir, mais les observateurs estiment qu'Israël est le seul pays du Moyen-Orient à détenir l'arme atomique.

Moscou et Washington, les deux plus grandes puissances nucléaires au monde, avaient signé en 2010 un nouveau traité de désarmement nucléaire, entré en vigueur en février 2011, et ce pour dix ans.

La Russie détient un stock de 8500 ogives nucléaires tandis que les États-Unis possèdent environ 7700 ogives nucléaires au total, selon la revue américaine Bulletin of the Atomic Scientists, qui se base sur des données datant de mars 2013.