Désormais au centre de l'enquête sur la disparition du Boeing malaisien, son «cockpit» présente un profil ordinaire et inoffensif à première vue: un commandant de bord militant de l'opposition progressiste, bricoleur et cordon-bleu, et un jeune copilote sur le point de se marier.

L'analyse des commandes effectuées depuis le poste de pilotage du Boeing depuis son décollage de Kuala Lumpur le samedi 8 mars à 00H41 a révélé une succession d'actes «délibérés» ayant entraîné la disparition de l'avion, selon la Malaisie.

Les autorités malaisiennes assurent s'intéresser à tous les passagers et personnels de bord du vol MH370 mais les difficultés d'accès au cockpit et la technicité requise pour effectuer certaines des commandes ont orienté les enquêteurs en priorité vers le commandant et son copilote.

Samedi 15, une semaine après la volatilisation du Boeing, les domiciles de Zaharie Ahmad Shah, 53 ans, et de Fariq Abdul Hamid, 27 ans, ont été perquisitionnés.

Mais ni l'examen du passé des pilotes ni l'audition de leur entourage n'ont pour l'instant permis de les impliquer.

L'attention médiatique s'est d'abord portée sur le commandant Zaharie, membre d'un parti de l'opposition malaisienne dirigée par le charismatique Anwar Ibrahim.

Ancien vice-premier ministre, Anwar a été reconnu coupable de sodomie - illégale en Malaisie - lors de son procès en appel le vendredi 7 mars, quelques heures avant le vol MH370, malgré ses démentis répétés.

Les proches du pilote ont rejeté des informations de presse selon lesquelles ce nouveau verdict de culpabilité - après un acquittement en 2012 - l'avait mis hors de lui.

Sivarasa Rasiah, député de l'opposition dans la circonscription où vit le pilote, près de Kuala Lumpur, affirme que Zaharie Ahmad Shah est un militant comme les autres, engagé mais modéré.

«Il était un parmi des centaines, sinon des milliers (de sympathisants) qui ont aidé pendant la campagne électorale de mai (2013). Il ne connaissait pas Anwar personnellement», plaide-t-il.

Pour son assistant parlementaire, Peter Chong, qui le rencontrait une fois par mois autour d'un thé, les allégations faisant du pilote un militant politique «fanatique ne méritent aucune réponse».

«Un bon garçon»

Les médias se sont aussi intéressés à un simulateur de vol que Zaharie avait lui-même assemblé et que les enquêteurs ont saisi à son domicile pour expertises.

Les spécialistes affirment qu'il n'est pas rare pour un pilote d'avion de ligne de posséder ce genre de gadgets. Ses collègues, proches et amis, le décrivent en outre comme un pilote respecté et un homme affable, volontiers cuisinier et bricoleur, amateur de karaoké à l'occasion.

Sur sa chaîne YouTube, l'homme, qui apparaît enjoué, donne des conseils pour réparer un climatiseur, colmater des fenêtres, etc.

Son copilote Fariq Abdul Hamid a attiré l'attention sur lui pour avoir invité une jeune Sud-Africaine dans le cockpit lors d'un vol reliant la Thaïlande à Kuala Lumpur en 2011, en infraction des règles en vigueur dans l'aviation civile depuis les attentats du 11 septembre 2001 aux États-Unis.

Mais là encore, tous ceux qui connaissent de près ou le loin ce fils de haut fonctionnaire décrivent un homme sans histoires, bien élevé, fiancé à une jeune femme de son âge rencontrée à l'école de pilotage il y a neuf ans.

Selon les médias malaisiens, il s'agit de Nadira Ramli, 26 ans, pilote sur AirAsia, la filiale à rabais de Malaysia Airlines, fille d'un pilote chevronné de la compagnie.

Fariq se rendait régulièrement à la mosquée de son quartier, en banlieue de Kuala Lumpur, pour y prier ou suivre quelques cours de théologie islamique, selon l'imam Ahmad Sharafi Ali Asrah qui voit en lui «un bon garçon».

Le gouvernement malaisien a exhorté l'opinion publique à ne pas tirer de «conclusions hâtives» sur les deux hommes qui, par ailleurs, n'avaient pas demandé à voler ensemble le 8 mars.

Le copilote aurait prononcé les derniers mots

Les derniers mots transmis au contrôle aérien par le cockpit du Boeing 777 de Malaysia Airlines auraient été prononcés par le copilote, a annoncé lundi la compagnie aérienne.

«Les investigations préliminaires suggèrent que c'est le copilote qui parlait», a déclaré le PDG de Malaysia Airlines, Ahmad Jauhari Yahya, lors d'une conférence de presse.

Cette information pourrait se révéler capitale dans l'enquête sur la disparition de l'avion. Les investigations se concentrent sur le commandant de bord, Zaharie Ahmad Shah, et son copilote, Fariq Abdul Hamid. La question centrale étant de savoir qui contrôlait l'appareil au moment où il a disparu des écrans radars civils suite à un «acte délibéré», selon les autorités malaisiennes.

Le message présumé du copilote - «Eh bien, bonne nuit» - a en effet été reçu 12 minutes après la désactivation volontaire, par une personne présente dans le cockpit, du système ACARS (Aircraft Communication Addressing And Reporting System) qui permet d'échanger des informations entre l'appareil en vol et le centre opérationnel d'une compagnie aérienne.

Le transpondeur, autre dispositif crucial, qui transmet les informations sur la position de l'appareil, a été manuellement désactivé deux minutes seulement après ce message.