Des élections législatives partielles se sont tenues dimanche en Thaïlande après que le scrutin du 2 février a été perturbé par l'opposition face à laquelle les «chemises rouges» pro-gouvernementales se mobilisent en menaçant de marcher sur Bangkok.

Le scrutin de dimanche s'est tenu dans 101 circonscriptions, dans cinq provinces, où sont inscrits quelque 120 000 électeurs, a indiqué à l'AFP un membre de la Commission électorale, Somchai Srisutthiyakorn.

L'élection s'est déroulée «pacifiquement (...), sans problème», a-t-il assuré, précisant tout de même qu'une poignée de manifestants avaient accueilli les électeurs au son des sifflets - devenus leur bruyant signe de ralliement - dans la province de Rayong.

Les électeurs étaient peu nombreux à Phetchaburi - une des provinces au sud de Bangkok, fief de l'opposition - selon un journaliste de l'AFP, sans signe visible d'obstruction par les protestataires.

«J'étais déçu de ne pas pouvoir voter le 2 février», a témoigné Sangwan Yuusuk, 57 ans.

Les manifestants, qui veulent remplacer le gouvernement par un «conseil du peuple» non élu, ont empêché le déroulement du scrutin dans 10 % des bureaux de vote le 2 février.

La Commission électorale a fait savoir qu'elle ne proclamerait pas les résultats avant que l'élection ne se soit tenue dans toutes les circonscriptions et fixé au mois d'avril la date limite pour les organiser.

D'ici là, la première ministre Yingluck Shinawatra reste en fonction avec des prérogatives très réduites.

Selon le code électoral thaïlandais, 95 % des 500 sièges à la chambre basse du Parlement doivent être pourvus pour permettre la constitution d'un nouveau gouvernement.

La Commission électorale a également fixé des élections sénatoriales au 30 mars.

Les «chemises rouges» se mobilisent 

L'opposition, qui n'a pas remporté d'élections générales depuis vingt ans, jure de chasser du pouvoir Yingluck Shinawatra. Elle est considérée comme la marionnette de son frère Thaksin qui l'a précédée dans ses fonctions avant d'être victime d'un coup d'État en 2006.

Au coeur de la crise, selon de nombreux analystes, se trouve la lutte pour le pouvoir, quand viendra le moment de la succession du roi Bhumibol, 86 ans.

Après des mois de manifestations et de violences de rue qui ont fait 23 morts et des centaines de blessés, la tension est descendue d'un cran vendredi avec l'annonce par les manifestants de la fin de leur opération «blocage de Bangkok».

Ils ont commencé dimanche à démonter leurs campements et leurs barrages dans la capitale après avoir annoncé leur intention de se replier provisoirement dans le grand parc Lumpini.

Mais si la pression de la rue se relâche, le chef du gouvernement reste sous la menace de la commission anticorruption, qui pourrait lui valoir son fauteuil et une privation de vie politique pendant cinq ans.

Les «chemises rouges» pro-Thaksin, qui avaient organisé les manifestations contre le précédent gouvernement au printemps 2010, multiplient les rassemblements publics après s'être abstenus d'intervenir depuis le début de la crise.

Des milliers de personnes se sont ainsi rassemblées pour manifester dimanche soir à Khon Kaen, un bastion des «chemises rouges» dans le nord-est, dont les populations pauvres estiment avoir bénéficié de programmes sociaux mis en place par Thaksin après avoir été longtemps ignorées.

«Nous sommes prêts à nous rendre à Bangkok si la situation reste chaotique», a déclaré à l'AFP un porte-parole des «chemises rouges», Thanavut Vichaidit.

La chute de Thaksin en 2006 par un coup d'État a plongé la Thaïlande dans un cycle de crises politiques et de violences mettant en lumière les divisions du pays.

En 2010, la répression des manifestations des «rouges» qui avaient occupé le centre de Bangkok pendant deux mois, avant un assaut de l'armée autorisée à tirer à balles réelles, avait fait plus de 90 morts et 1900 blessés.

La crise actuelle a été marquée par plusieurs attaques par armes à feu ou à la grenade contre les manifestants par des assaillants inconnus, faisant craindre une escalade de la violence.

Des partielles restent à organiser dans d'autres provinces où les protestataires avaient empêché les électeurs d'accéder aux bureaux de vote, mais aucune date n'a été annoncée.