Une enquête menée par le Consortium international de journalistes d'investigation (ICIJ) révèle que les proches de plusieurs hauts dirigeants chinois ont fait appel à des paradis fiscaux réputés pour leur opacité.

L'organisation, qui a eu accès aux dossiers de deux firmes spécialisées dans la création d'entreprises offshore, a notamment dévoilé il y a quelques jours que le beau-frère du chef d'État Xi Jinping détenait 50% d'une société basée aux îles Vierges britanniques.

L'ICIJ estime que le recours aux paradis fiscaux a aidé à dissimuler «la richesse de l'élite communiste» chinoise, un sujet particulièrement sensible dans le pays alors que les inégalités économiques continuent de croître.

Témoignant de l'importance du phénomène, près de 22 000 clients de paradis fiscaux dont les adresses étaient en Chine ou à Hong Kong ont été identifiés dans les dossiers analysés.

Les autorités chinoises ont réagi avec agacement à ces révélations, suggérant qu'il y avait une «intention derrière» la diffusion simultanée des résultats de l'enquête par plusieurs médias membres du consortium, dont Radio-Canada. L'accès de plusieurs sites internet a été bloqué en Chine afin de limiter leur impact.

Les autorités de Pékin avaient agi de manière similaire à l'automne à la suite de la diffusion de reportages explorant la richesse de l'entourage de certains dirigeants.

Rétorsion

Plusieurs journalistes de Bloomberg et du New York Times ont éprouvé d'importantes difficultés par la suite à renouveler leur visa de travail en Chine, ce qui a suscité une intervention critique remarquée du vice-président américain Joe Biden.

L'association des correspondants étrangers a accusé les autorités, dans un bilan de fin d'année, de multiplier les pressions sur les journalistes pour influer sur leur couverture.

Les dirigeants chinois ont utilisé des méthodes plus musclées pour museler un mouvement citoyen qui demande aux élus de faire preuve de plus de transparence relativement à leur richesse personnelle.

Xu Zhiyong, un avocat qui a fait campagne ouvertement contre la corruption, avait lancé un appel à la mobilisation qui lui a valu de sérieux ennuis avec les autorités.

Il est accusé d'avoir voulu réunir des foules pour «troubler l'ordre public» et s'expose à une peine d'emprisonnement de cinq ans dans le cadre d'un procès ouvert cette semaine. Une soixantaine d'autres personnes liées au «Mouvement des nouveaux citoyens» auraient été appréhendées dans les derniers mois, selon une organisation chinoise de défense des droits de l'homme.

Amnistie internationale a réclamé cette semaine la libération «immédiate et inconditionnelle» de Xu Zhiyong.

«Plutôt que de cibler la corruption comme le promettait le président Xi Jinping, les autorités ciblent les personnes qui veulent dénoncer la corruption», a déploré dans un communiqué une analyste de l'organisation, Roseann Rife.

Un ex-premier ministre montré du doigt

Le New York Times a révélé en novembre que plusieurs membres de la famille de l'ex-premier ministre Wen Jiabao, incluant son fils et sa fille, étaient devenus «extraordinairement riches» pendant son passage au pouvoir. Le quotidien a établi que ses proches contrôlaient des actifs d'une valeur estimée à près de 3 milliards de dollars, ce que nie le principal intéressé.

Le quotidien a dévoilé par ailleurs que JP Morgan avait versé 1,8 million de dollars à une firme de consultants contrôlée par la fille de l'ex-premier ministre qui a été établie, selon le Consortium international de journalistes d'investigation, dans les îles Vierges britanniques. Les autorités fédérales américaines ont ouvert une enquête pour déterminer si l'entreprise américaine a contrevenu aux lois interdisant la corruption de fonctionnaires étrangers.