Le roi de Thaïlande a plaidé jeudi pour la «stabilité» du pays, alors que les manifestants se préparaient à poursuivre leur mouvement visant à faire tomber le gouvernement après une trêve précaire à l'occasion du 86e anniversaire du révéré monarque.

Le roi Bhumibol Adulyadej est considéré comme un demi-dieu par nombre de Thaïlandais, et des violences jeudi, jour de son anniversaire, auraient été vues comme un affront. L'approche de l'événement a permis une pause dans les manifestations réclamant depuis un mois le départ de la première ministre Yingluck Shinawatra.

La Thaïlande a été «en paix pendant longtemps parce que tout le monde travaillait ensemble au bénéfice du pays», a commenté jeudi le monarque constitutionnel lors d'un discours télévisé, habituel pour son anniversaire, mais très attendu cette année en raison des tensions.

«Chaque Thaïlandais devrait être conscient de ça et assumer son rôle au bénéfice du pays, c'est-à-dire la stabilité et la sécurité du pays», a-t-il ajouté, sans mentionner spécifiquement les troubles actuels.

Des milliers de Thaïlandais vêtus de jaune - couleur du roi -, certains pleurant, sont descendus dans les rues de Hua Hin pour s'agenouiller devant le cortège royal à l'occasion de cette cérémonie officielle dans la station balnéaire au sud de Bangkok où le souverain réside depuis l'été.

Mais dans la capitale, le calme restait précaire, les manifestants qui veulent remplacer le gouvernement par un «conseil du peuple» non élu ayant promis de reprendre le combat dès vendredi.

«Nous allons continuer», a répété jeudi l'un de leurs meneurs, Satit Wongnongtauy, promettant la «victoire» dans quelques jours. Une victoire qu'ils avaient déjà annoncée pour dimanche dernier.

Ces derniers jours, des affrontements violents ont eu lieu entre la police et les manifestants opposés à Yingluck et à son frère Thaksin, ancien premier ministre renversé par un coup d'État en 2006 et qui reste au coeur de la politique du royaume malgré son exil.

Les autorités ont finalement changé de tactique mardi, laissant ces militants entrer brièvement aux sièges du gouvernement et de la police, sans résistance.

«Demain nous manifesterons»

Après un pic à quelque 180 000, le nombre de manifestants a largement diminué, et jeudi, les quelques milliers toujours rassemblés au Monument de la démocratie, lieu symbole de la mobilisation où ils campent depuis un mois, se préparaient à reprendre la lutte.

«Demain (vendredi), nous manifesterons. Nous reviendrons jusqu'à ce que nous obtenions la victoire pour le peuple thaïlandais», a promis Khieu, en regardant la cérémonie d'anniversaire sur écran géant.

La colère des manifestants, alliance de bourgeois conservateurs proches de l'opposition et de groupuscules ultra-royalistes, a été provoquée par un projet de loi d'amnistie qui, selon ses détracteurs, aurait permis le retour de Thaksin, en exil pour échapper à la prison pour malversations financières.

Malgré son rejet par le Sénat, les manifestants, qui accusent Yingluck d'être la marionnette de son frère, n'ont pas désarmé.

Le milliardaire divise le pays entre masses rurales et urbaines défavorisées du Nord et du Nord-Est, qui l'adorent, et les élites de Bangkok qui le haïssent et le voient comme une menace pour la monarchie.

Le roi Bhumibol, plus ancien monarque en exercice dans le monde avec plus de soixante années de règne, est considéré comme une force morale bienveillante dans un pays marqué par une histoire d'instabilité politique.

Par le passé, il était intervenu de façon spectaculaire au milieu de crises politiques. Mais admis en 2009 à l'hôpital qu'il a quitté en août pour rejoindre son palais de Hua Hin, le roi n'a fait que de rares apparitions publiques ces dernières années.

En 2010, il était resté largement silencieux lorsque quelque 100 000 «chemises rouges» fidèles à Thaksin avaient occupé le centre de Bangkok pour réclamer la démission du gouvernement, avant un assaut de l'armée. La crise, la plus grave qu'ait connue la Thaïlande moderne, avait fait quelque 90 morts et 1900 blessés.

Alors que les «rouges» ont mis un terme à leurs manifestations en soutien à Yingluck après des violences samedi entre manifestants pro et anti gouvernement qui avaient fait plusieurs morts dans des circonstances troubles, leur chef Thida Thavornset a annoncé un nouveau grand rassemblement mardi à Ayutthaya, à une heure de la capitale.