Les services de renseignements sud-coréens affirment que l'oncle et mentor du jeune dirigeant nord-coréen a été limogé, mais il faudra longtemps pour juger de la véracité de cette information et mesurer ses effets sur la conduite du pouvoir à Pyongyang, depuis toujours mystérieuse.

Rien n'a filtré des médias officiels nord-coréens depuis l'annonce mardi des services secrets à Séoul, qui ont annoncé le renvoi de Jang Song-thaek, oncle du dirigeant Kim Jong-un, et l'exécution de deux de ses proches.

Au Sud en revanche, les autorités et les analystes se perdent en conjectures sur la signification de la disparition de Jang, 67 ans, qui n'est pas réapparu en public depuis début novembre.

«Deux ans après l'arrivée de Kim Jong-un à la tête du pays, un travail est en cours pour réorganiser la structure du pouvoir dans le cercle le plus rapproché», a déclaré le ministre de la Défense, Kim Kwan-jin, devant de hauts responsables militaires.

Il n'est pas le premier oncle à tomber en disgrâce dans ce pays gouverné depuis la fin de la Deuxième Guerre mondiale par trois générations de Kim. Dans les années 70, le père de Kim Jong-un, Kim Jong-il, pas encore au pouvoir, avait «purgé» un oncle devenu trop puissant à son goût.

Mais le rapport des services secrets est constitué de supputations, comme de coutume quand il s'agit de la Corée du Nord, un des pays les plus secrets et les plus fermés au monde. Pour le moment, rien ne garantit la véracité des informations révélées mardi.

Que le Nord reste silencieux sur cette affaire n'a rien de surprenant. Mais Jang était vice-président de la Commission de défense nationale, considéré comme l'organe de décision le plus puissant du pays, et tout changement à sa tête est en général répercuté par les médias officiels, souligne un site respecté de surveillance du Nord, North Korea Leadership Watch.

Les modifications sont annoncées via les listes de hauts responsables présents lors d'événements officiels. Sans prévenir, un nouveau nom en remplace un ancien, devant la fonction.

Les services de renseignement se sont parfois trompés

Les conclusions des services secrets sud-coréens s'appuient sur deux éléments concomitants : l'exécution de deux proches de l'oncle, dont ils ont eu vent, et la disparition de ce même oncle depuis le 6 novembre.

Kim Yong-hyun, expert sur le sujet à l'Université Dongguk à Séoul, rappelle que les services de renseignement se sont parfois trompés. Il n'est pas inhabituel, en outre, qu'un proche du pouvoir nord-coréen disparaisse pendant plusieurs mois, avant de refaire surface, ajoute-t-il.

Des rumeurs avaient déjà évoqué un limogeage de Jang en 2009, 2010 et 2011. En 2004, il avait disparu pendant deux ans, laissant à penser qu'il était tombé en disgrâce. Avant qu'il ne ressurgisse.

La quête d'indices passe aussi par l'épouse du haut responsable, Kim Kyong-hui, soeur du père de Kim Jong-un, et les observateurs vont guetter ses apparitions en public ou la mention de son nom. Elle aurait été hospitalisée à plusieurs reprises ces derniers mois, pour cause de mauvaise santé.

Pendant des années, le couple était considéré comme l'un des plus influents du pays, l'oncle occupant même, selon des analystes sud-coréens, le rôle officieux de numéro deux.

Alexandre Mansourov, fin connaisseur du régime de Pyongyang, prédisait il y a un an la chute du mentor du jeune dirigeant. «Le jeune maréchal (Kim) va l'utiliser aussi longtemps qu'il en aura besoin, mais il finira certainement par s'en débarrasser, et sans regret vraisemblablement, tout comme son père s'était débarrassé de son propre oncle», écrivait-il alors.