Un porte-avion américain est arrivé jeudi au large des Philippines ravagées par le typhon Haiyan, offrant un peu d'espoir aux innombrables survivants qui attendent toujours de l'aide, tandis que de nombreux corps étaient enfin enterrés dans des fosses communes.

Le porte-avions George Washington, avec ses 5000 marins, et sept autres navires, se sont positionnés au large des îles les plus touchées, apportant avec eux des équipements médicaux, du ravitaillement et une expertise attendus avec impatience par les sinistrés affamés du typhon, dont le bilan devrait se chiffrer en milliers de morts.

La flottille, qui dispose notamment de 21 hélicoptères, a déjà pu livrer plusieurs palettes d'eau et de nourriture à l'aéroport de Tacloban, une des villes les plus meurtries, où bientôt une semaine après le passage d'Haiyan, l'aide arrive toujours trop lentement.

«J'ai le sentiment que nous avons abandonné les gens», a ainsi reconnu jeudi la responsable des opérations humanitaires de l'ONU Valerie Amos au lendemain d'une visite à Tacloban, capitale de l'île de Leyte.

«Les gens ont désespérément besoin d'aide. Nous devons leur apporter de l'aide maintenant. Ils disent déjà qu'elle prend trop longtemps à arriver. Assurer une distribution plus rapide est notre (...) priorité immédiate», a-t-elle ajouté.

Jeudi à Tacloban, au lendemain du report d'un enterrement collectif en raison de coups de feu, une centaine de corps enveloppés dans des sacs mortuaires ont été déposés dans une immense fosse commune, avant que l'opération ne soit interrompue par la panne d'une pelleteuse.

«Tellement de cadavres, ça fait peur»

«Il y a encore tellement de cadavres dans tellement d'endroits. Ca fait peur», a commenté le maire Alfred Romualdez, alors que flotte dans l'air l'odeur persistante de décomposition des corps qui jonchent encore les rues de sa ville, faisant peser des risques sanitaires.

«Quand il y a une demande d'une communauté pour qu'on collecte cinq ou dix corps, quand nous arrivons, il y en a quarante».

La municipalité estime avoir déjà ramassé 2000 corps, alors qu'estimer le bilan du typhon reste difficile.

L'ONU a évoqué la mort possible de 10 000 personnes dans la seule ville de Tacloban, mais le président philippin Benigno Aquino a estimé ce chiffre «trop élevé», parlant de «2000 à 2500» morts. Le dernier bilan officiel provisoire fait quant à lui état de 2357 morts et 77 disparus.

À Tacloban, les opérations de récupération des corps s'organisent petit à petit mais les autorités locales ont besoin d'aide, pour ça aussi, a plaidé Romualdez, réclamant «plus d'hommes et plus d'équipement». «Je ne peux pas utiliser un camion pour ramasser les cadavres le matin et l'utiliser pour distribuer de l'aide l'après-midi».

Le gouvernement philippin a reconnu avoir été dépassé par le nombre de morts, dont la collecte avait été ralentie par un manque de sacs mortuaires, désormais comblé.

Désespérés par la lenteur de l'aide, des centaines de sinistrés se pressent chaque jour à l'aéroport en ruines de Tacloban, espérant pouvoir obtenir une place sur un des rares vols en partance.

Le chaos

«Des gens ont marché pendant des jours sans manger, pour arriver ici et attendre des heures ou des jours», même sous la pluie, a raconté Efren Nagrama, un responsable de l'aviation civile. «Les gens sont poussés vers leur point de rupture. Ils voient des avions d'aide arriver mais ils ne peuvent pas obtenir de nourriture ou partir. C'est le chaos».

Un chaos aggravé par des actes de pillages commis notamment par des habitants affamés. Huit personnes sont mortes mardi écrasées lors de l'effondrement du mur d'un entrepôt de riz en train d'être pillé par des survivants non loin de Tacloban, où armée et police ont été déployées pour rétablir l'ordre.

Alors que de nombreux blessés ont toujours besoin d'être soignés, les experts s'inquiètent également des risques liés au manque d'eau potable, qui peut provoquer des diarrhées particulièrement dangereuses pour les enfants.

Les nombreux pays, ONG et agences internationales ont promis d'importantes aides financières et matérielles, qui continuaient à affluer jeudi.

Les Britanniques ont ainsi annoncé l'envoi du plus grand bâtiment de leur marine, le porte-hélicoptères HMS Illustrious.

Avant l'arrivée de leur flottille, les Etats-Unis, qui ont promis 20 millions de dollars, avaient déjà déployé une avant-garde de Marines épaulés par des avions de transport et des Ospreys, appareils qui peuvent voler comme un avion et atterrir comme un hélicoptère.

Alors que l'ONU a réclamé 301 millions de dollars pour faire face à l'urgence, le président américain Barack Obama a de son côté mercredi lancé un appel à la générosité de ses concitoyens.

«Avec tant de familles et de collectivités nécessitant une aide d'urgence de nourriture, d'eau, d'abris et de médicaments, même les plus petites contributions peuvent faire la différence et aider à sauver des vies», a-t-il plaidé.