L'aide d'urgence envoyée par l'ONU commençait avec difficulté à atteindre les régions dévastées des Philippines, hier, alors que le président du pays revoyait à la baisse l'estimation du nombre de morts dans la tragédie du typhon Haiyan.

En entrevue avec La Presse, Amanda Pitt, porte-parole du Bureau de la coordination des affaires humanitaires de l'ONU (OCHA), à New York, explique qu'il est «difficile de dire quand l'aide de l'ONU va être distribuée à tous les citoyens des régions les plus isolées» du pays.

Encore plusieurs jours

«Des biscuits énergétiques ont commencé à être distribués, des milliers de cachets de purification d'eau ont été distribués. Nous voyons tous les images des gens qui ont tout perdu [...] L'aide commence à se rendre jusqu'à eux, mais il va falloir plusieurs jours encore avant d'avoir un bon réseau de distribution en place dans les endroits les plus isolés.»

Hier, l'ONU a réclamé 301 millions de dollars américains pour les opérations de première ligne aux Philippines, où l'on compte 673 000 déplacés, et plus de 11 millions de personnes affectées dans 9 régions du pays par la destruction du typhon Haiyan.

«On ne parle pas de reconstruction à long terme ici: cet argent servira à fournir de la nourriture, des abris et de l'eau potable. Bref, à garder les gens en vie», explique Mme Pitt.

Estimation «trop élevée»

Hier, le président philippin Benigno Aquino a affirmé hier que l'estimation de 10 000 décès rapportés dans les médias était «trop élevée» et que le bilan final serait probablement inférieur aux projections.

Selon lui, le nombre de morts pourrait s'élever à 2500.

L'estimation de 10 000 morts était venue d'un policier et d'un officiel local qui vivaient peut-être «un traumatisme émotionnel» venant du fait qu'ils se trouvaient à l'épicentre du drame, a dit le président en entrevue à CNN, ajoutant que 29 municipalités isolées n'avaient toujours pas été contactés par le gouvernement.

Hier soir, le département de la Défense nationale des Philippines rapportait que le typhon avait fait 1798 morts, 2582 blessés et 82 disparus.

Le Bureau de la coordination des affaires humanitaires de l'ONU (OCHA) estime que 41 000 habitations ont été endommagées par le typhon Haiyan: 52% de ces habitations ont été détruites, alors que 48% sont endommagées.

C'est le gouvernement philippin qui est chargé de coordonner les opérations de secours sur le terrain. L'ONU et les organisations non gouvernementales vont là où les besoins apparaissent les plus criants.

Aujourd'hui, la chef des opérations humanitaires de l'ONU, Valérie Amos, doit se rendre dans la ville de Tacloban, l'un des endroits les plus dévastés aux Philippines.

«Les organismes d'aide ont besoin de 300 millions. Les besoins urgents: la nourriture, l'eau, les installations sanitaires et le dégagement des routes. J'espère que les gens seront généreux», a-t-elle écrit sur le site de microblogue Twitter, hier.

Hier, un avion de l'UNICEF avec 60 tonnes d'aide, dont des tentes et des médicaments, devait arriver aux Philippines, suivi d'équipements de purification d'eau.

Le ministère des Affaires étrangères de la France a acheminé du matériel humanitaire par un vol arrivé hier à Cebu, ville à partir de laquelle les secours s'organisent. La cargaison, d'une dizaine de tonnes, est composée de tentes, de bâches, de nécessaires de cuisine et de jerricanes, a indiqué le gouvernement français.

États-Unis: une intervention intéressée?

Washington a déployé des moyens considérables pour venir en aide aux Philippines.Le porte-avions nucléaire USS George Washington a quitté Hong Kong et est en route vers les Philippines.

Le porte-avions possède un équipage de 5000 marins et compte 80 avions. Il devrait arriver aux Philippines d'ici 24 à 48 heures. Plus de 2000 autres soldats sont également en route vers les Philippines à bord de différents navires. L'intervention humanitaire américaine survient alors que Washington tente, depuis des mois, d'accroître sa présence militaire aux Philippines sans parvenir à s'entendre avec le gouvernement du pays.

Le secrétaire à la Défense Chuck Hagel a assuré Manille qu'il ne cherchait pas à établir une force «permanente» dans l'archipel. Hier, le porte-parole du Pentagone, George Little, a déclaré à Washington que l'aide humanitaire déployée par l'armée américaine n'était en rien liée à la volonté d'accroître sa présence dans le pays. L'armée américaine avait dû quitter ses bases aux Philippines en 1992, sous la pression du gouvernement local.

PHOTO RICHARD A. BROOKS, AFP

Le porte-avions nucléaire USS George Washington a quitté Hong Kong et est en route vers les Philippines.