La confusion régnait dimanche aux Maldives après la décision de la Cour suprême de repousser le second tour de l'élection présidentielle, dont le grand favori est l'ancien président, premier chef d'État élu démocratiquement avant d'être renversé.

Malgré l'inquiétude croissante de la communauté internationale sur le processus démocratique dans cet archipel de l'océan Indien, les autorités sont intervenues dimanche pour la troisième fois en trois mois pour retarder l'élection.

Des élections début septembre avaient été annulées, avant que le rendez-vous électoral promis pour octobre soit finalement repoussé au week-end des 9 et 10 novembre.

Après le 1er tour, qui s'est tenu samedi, les bureaux de vote devaient rouvrir dès dimanche à la mi-journée et permettre aux Maldives, célèbres pour leurs plages de sable blanc et leurs eaux turquoises, d'être enfin dotées d'un président, comme la Constitution le réclame.

Mais «toutes les autorités concernées sont informées que les élections prévues ce jour (ce dimanche: ndlr) ne peuvent pas se tenir», a indiqué la Cour suprême, acceptant ainsi la demande du candidat arrivé à la 3e place.

La Constitution de 2008 stipule pourtant qu'un nouveau président doit être élu avant le 11 novembre. Elle ne prévoit aucun intérim et le pays, dont la manne touristique dépend de sa stabilité, serait menacé de chaos en cas de vacance du pouvoir.

Mohamed Nasheed, 46 ans, dirigeant de l'opposition, est arrivé en tête samedi avec 46,93% des votes selon le dernier décompte. Un score largement supérieur à celui des deux autres candidats, mais insuffisant pour lui permettre d'être proclamé vainqueur dès le 1er tour.

M. Nasheed a été le premier chef d'État démocratiquement élu dans le pays, en 2008, après 30 ans de pouvoir autocratique. Ancien prisonnier politique et activiste en faveur de l'environnement, il s'en était pris au pouvoir judiciaire et aux forces de l'ordre, dont les postes clés sont occupés par des proches de son prédécesseur.

Poussé à la démission en février 2012 lors de ce qu'il a qualifié d'un «coup d'État», il a dénoncé ces dernières semaines de nouvelles manoeuvres visant à le priver de la victoire.

L'homme aurait dû affronter dimanche Abdulla Yameen (29,73% des voix). Yameen est le demi-frère de Maumoon Abdul Gayoom, autocrate qui a régné sur les Maldives et ses 350.000 habitants --des musulmans sunnites-- pendant 30 ans.

Qasim Ibrahim, un riche homme d'affaires qui a fait fortune dans le tourisme de luxe, était arrivé 3e (23,34%). C'est lui qui a déposé un recours devant la Cour suprême --comme il l'avait fait en septembre--, recours à nouveau accepté.

Il demande quelques jours de répit afin de pouvoir donner ses consignes de vote à ses sympathisants et soutient Abdulla Yameen.

L'archipel, prisé des touristes fortunés, a essuyé un regain de critiques de la part des chancelleries occidentales depuis l'annulation des résultats d'un premier tour, le 7 septembre. Elles craignent que les décisions des autorités ne visent surtout à empêcher Nasheed de retrouver le pouvoir.

Les Etats-Unis et le Commonwealth ont tous deux mis en garde contre de nouveaux délais.

«Il est impératif que le second tour prenne place immédiatement et conformément aux directives de la commission électorale, afin d'assurer que le peuple des Maldives soit mené par un président élu par leurs soins», a déclaré la porte-parole du département d'État américain Jen Psaki.

Pour l'envoyé spécial des 53 pays du Commonwealth, Don McKinnon, «il est important que le processus électoral avance rapidement vers sa conclusion, avec la tenue d'un second tour».

«Il n'est pas raisonnable et pas acceptable que des parties continuent de demander des changements dans les dates des élections qu'elles avaient acceptées» dans un premier temps, a-t-il ajouté.