Le dalaï-lama a appelé mardi les moines bouddhistes en Birmanie, présumés incitateurs aux violences meurtrières contre la minorité musulmane dans ce pays, à respecter les principes bouddhistes pour mettre fin à l'effusion de sang.

«À ces moines birmans en colère à l'égard de nos frères et soeurs musulmans, je demande : rappelez-vous, s'il vous plaît, la foi bouddhiste», a déclaré le leader bouddhiste devant la presse à Prague, au cours d'une conférence consacrée aux droits de l'homme.

«Je suis sûr (...) que ceci protégerait ces frères et soeurs musulmans qui en deviennent victimes», a insisté le chef spirituel en exil des Tibétains.

Les violences communautaires dans l'État de Rakhine, dans l'ouest de la Birmanie, ont fait depuis un an quelque 200 morts, notamment des Rohingyas apatrides, et environ 140 000 déplacés.

Les quelque 800 000 Rohingyas musulmans, confinés dans l'Ouest birman, sont considérés par l'ONU comme une des minorités les plus persécutées de la planète.

La dirigeante de l'opposition birmane Aung San Suu Kyi, qui s'était jusqu'ici peu exprimée sur ces affrontements inter-religieux, a de nouveau plaidé dans ce contexte mardi à Prague pour une modification de la Constitution birmane.

«Le problème ethnique ne pourra pas être résolu par la Constitution actuellement en vigueur qui ne répond pas aux aspirations des minorités ethniques», a-t-elle déclaré, au cours d'une conférence de presse.

Un comité composé de parlementaires a été invité par le pouvoir législatif en Birmanie à remettre d'ici la fin d'année un rapport contenant ses propositions d'amendements de la Constitution rédigée il y a une décennie par la junte militaire qui était alors au pouvoir.

Selon Mme Suu Kyi, la haine ethnique a ses racines dans la peur provoquée par un manque d'accès à la justice, ce que la nouvelle Constitution est susceptible de changer à ses yeux.

«En premier lieu, nous devons donner aux gens un sentiment de sécurité, ils doivent sentir qu'ils bénéficient d'un accès égal à la justice», a déclaré la lauréate du Prix Nobel de la paix en 1991.

«Si quelqu'un craint d'être attaqué par des membres d'une autre communauté, vous ne pouvez pas attendre qu'ils s'assoient ensemble à la table de négociations», a-t-elle souligné.

La semaine dernière, Mme Suu Kyi avait déclaré à Varsovie qu'elle n'était pas en mesure d'enrayer à elle seule la violence contre les musulmans en Birmanie et que cela dépendait de l'instauration d'un État de droit.

Selon l'opposante birmane, qui a passé 15 ans en résidence surveillée jusqu'à sa libération par les militaires en novembre 2010, la solution passe par la mise en place d'un État de droit.

Le dalaï-lama, prix Nobel de la paix en 1989, a également estimé mardi qu'il y avait «trop d'accent dans le monde sur les notions "nous" et "ils"», et que le 21e siècle pourrait devenir «un siècle de dialogue et non de guerre».

Mme Suu Kyi et le dalaï-lama se sont rencontrés à Prague en privé dimanche, au risque de provoquer la colère de la Chine, puissant voisin de la Birmanie, qui considère le dalaï-lama comme un «séparatiste» antichinois.