Le seul réacteur nucléaire en service au Japon était dimanche en train d'être stoppé pour maintenance, une opération certes prévue, mais qui va totalement priver l'archipel d'énergie atomique pendant une période inconnue que les militants antinucléaires voudraient infinie.

«Les procédures d'arrêt du réacteur 4 d'Ohi (ou Oi, ouest) ont débuté dimanche vers 16H40 (07H40 GMT) et son arrêt sera effectif lundi matin», a annoncé à l'AFP un porte-parole de la compagnie Kansai Electric Power (Kepco).

Toutes les centrales nippones avaient été progressivement mises hors service sine die par précaution supplémentaire à la suite de l'accident de Fukushima causé par le séisme et le tsunami du 11 mars 2011 dans le nord-est du Japon.

Kepco avait toutefois reçu en juin 2012 des élus locaux et du premier ministre d'alors, Yoshihiko Noda, l'autorisation de remettre en exploitation les réacteurs 3 et 4 d'Ohi.

L'unité 3 avait été relancée le 1er juillet 2012. Elle a été de nouveau stoppée le 2 septembre dernier, également pour un entretien régulier, obligatoire après environ 13 mois de fonctionnement en continu.

L'unité 4 avait pour sa part été réactivée le 19 juillet 2012. Une fois celle-ci coupée, le Japon se retrouvera de nouveau totalement privé d'énergie nucléaire plusieurs mois.

Il est en effet matériellement impensable que d'autres réacteurs japonais soient relancés sous peu, même si des compagnies, dont Kepco, ont postulé pour que la sûreté de plusieurs installations soit vite certifiée par l'autorité de régulation à l'aune de nouvelles normes plus strictes entrées en vigueur le 8 juillet dernier.

Du coup, le Japon, qui avait connu une période «zéro nucléaire» (malgré un parc de 50 unités) de mai à juillet 2012, va se retrouver à partir de lundi dans la même situation, alors que les réacteurs nucléaires du pays fournissaient environ un quart de la production électrique du pays avant le drame de Fukushima. Il y avait alors 54 réacteurs exploitables.

Si les compagnies parviennent néanmoins à fournir assez d'électricité sans qu'aucun ne fonctionne, c'est qu'elles font turbiner à plein régime des centrales thermiques (dont une partie a même été réactivée spécialement) et que les consommateurs font des économies.

Cette situation ne satisfait toutefois nullement le gouvernement actuel ni les industriels, car la facture d'importation d'hydrocarbures a explosé et le déficit commercial s'est creusé.

Pourtant, aucun réacteur nucléaire ne peut redémarrer tant que l'autorité nucléaire (statutairement indépendante) ne s'est pas prononcée sur sa sûreté.

Plusieurs dossiers sont en cours d'évaluation, mais des travaux sont prévus dans toutes les centrales pour que les équipements soient mis en conformité avec les nouvelles normes imposées par l'autorité elle-même, tant vis-à-vis des catastrophes naturelles que des actions terroristes.

Même si cette instance pourrait accorder des délais de grâce pour les modifications nécessaires, son rôle n'est toutefois pas de décider de relancer des réacteurs, mais d'établir un jugement sur leur sûreté.

La décision finale d'autoriser le redémarrage revient au pouvoir politique, les gouverneurs des préfectures hébergeant les installations nucléaires concernées ayant même un quasi droit de veto sur la décision.

Le gouvernement de droite de Shinzo Abe est pour sa part favorable à la réactivation des réacteurs du pays, mais assure qu'il se conformera à l'avis de l'autorité.

Les organisations antinucléaires et une partie de la population aimeraient au contraire que l'arrêt des centrales soit définitif, puisque la situation actuelle prouve selon elles que le Japon peut se passer de l'atome.

Beaucoup, tel le gouverneur de la préfecture de Niigata (qui héberge la plus importante centrale du Japon), estiment en outre que le pays ne doit pas réautoriser l'exploitation de réacteurs tant que n'est pas résolu l'accident de Fukushima provoqué par le tsunami du 11 mars 2011.

Même si le premier ministre japonais a affirmé que la situation était «sous contrôle», de nombreux incidents (dont des fuites d'eau radioactive en mer) se produisent quotidiennement sur le site en péril où travaillent 3000 ouvriers qui se sentent parfois dépassés par les événements, comme l'a d'ailleurs reconnu un responsable de la compagnie Tepco vendredi, mettant sa hiérarchie et le gouvernement dans l'embarras.