Les forces afghanes ont officiellement pris mardi le contrôle de la sécurité du pays à la place de l'Otan, une étape importante du retrait occidental prévu ces prochaines années, quelques heures après un nouvel attentat qui a fait trois morts à Kaboul.

Le processus de transfert d'autorité progressif, qui avait débuté en juillet 2011, s'est achevé dans la matinée avec le passage sous contrôle du gouvernement afghan des derniers districts contrôlés par la force internationale de l'OTAN (ISAF).

«Nos troupes courageuses auront la responsabilité de la sécurité» du pays et «mèneront désormais les opérations», s'est félicité le président afghan Hamid Karzaï dans un discours prononcé lors de la cérémonie officielle de passage de témoin organisée à Kaboul.

Les forces afghanes «prennent le relais avec une détermination remarquable, et méritent le soutien de l'ensemble du peuple afghan», a de son côté déclaré  le secrétaire général de l'OTAN, Anders Fogh Rasmussen, au cours de la cérémonie.

Le passage de témoin, qui avait commencé avec des provinces comptant parmi les plus paisibles d'Afghanistan, s'achève avec le transfert de 95 districts de provinces elles très marquées par l'insurrection: Kandahar (sud), bastion historique des talibans, et Khost et Paktika, sanctuaires des rebelles le long de la frontière pakistanaise, dans le sud-est.

L'ISAF n'aura en théorie désormais plus qu'un rôle de soutien, notamment aérien en cas d'attaque sérieuse, et de formation des quelque 350 000 membres des forces de sécurité afghanes (soldats, policiers et paramilitaires). La grande majorité des 100 000 membres de la force internationale doivent quitter le pays d'ici la fin 2014. Les États-Unis, qui lui fournissent les deux tiers de ses soldats, prévoient toutefois de laisser dans le pays un contingent de soldats dont ils n'ont pas encore précisé le nombre.

La fin du transfert de la sécurité «est l'une des questions très importantes pour l'Afghanistan», avait déclaré la semaine dernière Masoom Stanikzaï, secrétaire du Haut Conseil de la paix (HPC), structure mise en place mi-2010 par le président Karzaï pour établir des contacts avec les responsables talibans.

«L'idée que l'Afghanistan était occupée par des troupes étrangères qui resteraient éternellement dans le pays était l'un des principaux prétextes qui a permis aux talibans et à d'autres groupes de recruter des combattants», avait-il ajouté.

Attentat juste avant le passage de témoin

Mais nombre d'observateurs doutent de la capacité des forces afghanes à assurer seules la sécurité du pays, notamment face aux talibans, chassés du pouvoir par les Occidentaux à la fin 2001 et qui ont gagné du terrain ces dernières années.

Des contacts ont eu lieu ces dernières années entre Américains et rebelles, mais n'ont à ce jour rien donné, faute d'accord entre les deux parties, les talibans refusant notamment toute présence militaire américaine dans le pays après 2014. Ce statut quo fait craindre une nouvelle guerre civile dans le pays une fois que les troupes étrangères l'auront quitté.

Une série d'attaques récentes, dont plusieurs visant le gouvernement dans la capitale Kaboul, ont démontré la capacité des rebelles à frapper les endroits censés être plus sécurisés, même s'ils ne sont pas en mesure de prendre militairement la capitale, quadrillée par les forces locales et de l'OTAN.

Comme un symbole, la dernière a eu lieu moins de deux heures avant la cérémonie de passage de témoin, et a visé  Mohammed Mohaqiq, un leader de la minorité hazara, influent membre du parlement et allié du président Karzaï.

Au moins trois civils ont été tués et 24 blessés dans l'explosion de la bombe artisanale dissimulée près de la maison de M. Mohaqiq, selon la police, qui avait dans un premier temps évoqué par erreur un attentat suicide.

«L'attaque visait Mohammed Mohaqiq, qui en a réchappé indemne», a indiqué un membre de l'entourage du parlementaire, précisant que la bombe avait explosé devant les bureaux de la Commission afghane des droits de l'Homme.

De part son influence, M. Mohaqiq est appelé à jouer un rôle important lors de l'élection présidentielle de l'an prochain. Celle-ci s'annonce incertaine en raison de l'insécurité persistante dans le pays mais également de l'absence à ce jour de favori déclaré, le président Karzaï devant laisser sa place car arrivé au terme de deux mandats.