L'ancien président pakistanais Pervez Musharraf a mis fin dimanche à plus de quatre années d'exil entre Dubaï et Londres et défié les talibans, qui avaient promis de le tuer à son retour, en rentrant chez lui pour «sauver» le Pakistan au «péril de sa vie».

Parti dans la matinée de Dubaï, l'avion transportant l'ancien président, au pouvoir de son coup d'État en 1999 à sa démission en 2008, est arrivé à Karachi (sud) en début d'après-midi, a constaté un journaliste de l'AFP à bord de l'appareil.

L'ex-président, vêtu pour l'occasion d'une longue chemise traditionnelle blanche, est arrivé avec plusieurs dizaines de ses partisans venus du Canada, des États-Unis et de Grande-Bretagne qui n'ont cessé de scander «Longue vie à Musharraf!» au cours tout au long de ce vol régulier.

«Je suis rentré aujourd'hui à la maison. Où sont ceux qui ont dit que je ne reviendrais jamais», a lancé l'ancien président pakistanais aujourd'hui âgé de 69 ans.

Le mouvement des talibans du Pakistan (TTP) allié à Al-Qaïda avait annoncé samedi «préparer un commando de kamikazes spécialement pour (tuer) Musharraf» à son retour.

Pervez Musharraf avait, lorsqu'il était président de la seule puissance militaire nucléaire musulmane, survécu à trois attentats échafaudés contre lui par des groupes islamistes, très présents dans ce vaste pays de 180 millions d'habitants, instable et voisin de l'Afghanistan.

Après ces menaces, le rassemblement pro-Musharraf prévu à la tombe de Mohammad Ali Jinnah, le fondateur du Pakistan, été déplacé à l'aéroport, un lieu moins symbolique, mais jugé plus sûr. Or en milieu de journée dimanche ce nouveau rendez-vous a été annulé en raison de menaces sécuritaires, forçant le général à la retraite à improviser une conférence de presse chaotique.

«Mon peuple m'a demandé de rentrer pour sauver le Pakistan même au péril de ma vie. Je veux dire à ceux qui font de telles menaces que je suis béni par Dieu tout puissant», a déclaré M. Musharraf. «Je n'ai peur de personne sauf de Dieu... Je mets ma vie en danger en rentrant», a-t-il ajouté.

Le TTP, qui dénonce l'alliance du Pakistan avec les États-Unis, initiée par M. Musharraf après les attentats du 11 septembre 2001, est considéré comme le principal auteur de la vague sans précédent d'attentats --suicide pour la plupart-- qui ont fait plus de 5.700 morts dans tout le Pakistan depuis 2007.

«Où est le Pakistan que j'ai laissé il y a cinq ans ? Mon coeur saigne de voir aujourd'hui la pauvreté, le chômage et l'inflation galopante», a-t-il ajouté, appelant à la fin des hostilités à Karachi, métropole en proie à une guerre des gangs meurtrière sur fond de rivalités politiques ethniques et économiques.

M. Musharraf, dont la gestion des affaires civiles est moins dénoncée que celle du gouvernement qui lui a succédé, jugé corrompu et inefficace, se présente comme une «alternative» aux partis classiques pour les élections générales du 11 mai.

Mais son alliance avec Washington après 2001, point de départ d'une décennie sanglante, reste très critiquée, et nombre d'observateurs estiment qu'il a perdu sa base électorale et ne semble guère en mesure de bouleverser le scrutin avec sa formation politique, l'APML, formée en 2010 en exil.

M. Musharraf avait par le passé annoncé à plusieurs reprises son retour au pays avant de se raviser, par crainte d'être incarcéré à l'arrivée parce qu'il est visé par trois mandats d'arrêt. La justice pakistanaise lui a garanti vendredi qu'il bénéficierait d'une liberté sous caution, ouvrant la porte à son retour.