Le Pakistan et l'Inde ont décidé mercredi de réduire les tensions sur la ligne de démarcation qui sépare leurs deux armées au Cachemire, après dix jours d'incidents meurtriers et d'accusations mutuelles.

Quelques heures après que la ministre pakistanaise des Affaires étrangères eut accusé New Delhi de « bellicisme », la partie indienne a fait état d'un accord des responsables des deux armées pour une « désescalade » au Cachemire.

« Un accord a été obtenu entre les deux directeurs généraux des opérations militaires pour une désescalade de la situation le long de la Ligne de contrôle », a déclaré à l'AFP un porte-parole indien, Jagdeep Dahiya.

Le général indien Vinod Bathia et le général pakistanais Afshaq Nadeem se sont parlé au téléphone « pendant dix minutes », a-t-il dit.

« Le directeur général pakistanais a dit que de strictes instructions de ne pas violer le cessez-le-feu avaient été données », a rapporté M. Dahiya, qui a indiqué que les troupes indiennes n'allaient pas non plus violer le cessez-le-feu. « Nous avons toujours respecté le cessez-le-feu et nous avons seulement riposté », a assuré le porte-parole indien.

Peu après, l'armée pakistanaise a confirmé dans un communiqué un accord sur une réduction des tensions. Lors de l'entretien des deux généraux, « le Pakistan a émis une ferme protestation » contre la mort d'un soldat pakistanais abattu mardi par les forces indiennes selon Islamabad. « Toutefois, les deux parties sont tombées d'accord sur la nécessité de réduire les tensions sur la Ligne de contrôle », a indiqué l'armée pakistanaise.

La Ligne de contrôle (LOC) est une ligne d'armistice qui constitue une frontière de facto: elle marque la limite entre la partie indienne et la partie pakistanaise du Cachemire, une région que l'Inde et le Pakistan se disputent. Un cessez-le-feu est en vigueur sur la LOC depuis 2003.

La tension entre les deux capitales était encore montée d'un cran mardi lorsque l'armée pakistanaise avait annoncé qu'un de ses soldats, le troisième en quelques jours, avait été tué par des tirs « non provoqués » de l'armée indienne sur la Ligne de contrôle.

Il s'agissait du cinquième décès annoncé par l'une ou l'autre des deux armées depuis le 6 janvier.

C'est à la suite de cette annonce que la ministre pakistanaise des Affaires étrangères, Hina Rabbani Khar, a accusé l'Inde de « bellicisme ».

Fustigeant les commentaires de la classe politique indienne, la ministre pakistanaise, parlant mercredi à New York, a jugé « profondément perturbant d'entendre (à New Delhi) des déclarations qui font monter les enchères, où chaque homme politique est en concurrence avec l'autre pour faire une déclaration encore plus hostile ».

Auparavant, les diplomates des deux pays ont appelé au calme pour tenter de préserver les timides progrès réalisés depuis la récente fin du gel des relations indo-pakistanaises dû aux attentats islamistes de Bombay en 2008.

L'Inde affirme que deux de ses soldats ont été tués le 8 janvier, et que l'un d'eux a été décapité, le long de la LOC. Elle demande que soit rendue la tête du soldat.

Le Pakistan dément la responsabilité de son armée et affirme que trois militaires pakistanais ont été récemment tués lors de heurts frontaliers.

L'Inde et le Pakistan, les deux puissances nucléaires rivales de l'Asie du Sud, se sont affrontés dans trois guerres depuis leur indépendance simultanée en 1947. Deux de ces conflits portaient sur le Cachemire.

Mme Khar a jugé que New Delhi et Islamabad devaient surmonter le passé fait de « récits d'hostilité ». « Les portes du dialogue sont ouvertes », a-t-elle déclaré. « Nous devons nous rencontrer à tous niveaux, je pense que nous devons nous téléphoner, nous devons devenir des pays matures ».

Mais la ministre pakistanaise a de nouveau démenti les accusations indiennes de décapitation et a affirmé qu'une enquête n'avait établi « aucune preuve » de la mort de deux soldats indiens.

Ces dénégations pourraient provoquer un regain d'indignation en Inde, où le premier ministre, Manmohan Singh, a jugé mardi que le pays ne pouvait faire « comme si de rien n'était » avec le Pakistan. « Ce qui s'est passé est inacceptable », a-t-il insisté.

Les quotidiens indiens estimaient que les déclarations de Manmohan Singh révélaient une frustration croissante de New Delhi face au déni de responsabilité d'Islamabad.

Après le gel de leurs relations à la suite des sanglants attentats de Bombay attribués à des islamistes basés au Pakistan, les pays ont repris langue peu à peu, accomplissant des progrès notables sur des sujets tels que l'amélioration du commerce bilatéral ou du régime de visas.