Des millions de dollars détournés des fonds publics en Birmanie vont devoir être remboursés par les entreprises privées et fonctionnaires qui en ont indûment profité, selon un rapport soumis au parlement dans l'un des pays les plus corrompus du monde.

Dans ce document envoyé au parlement début novembre et dont l'AFP a obtenu copie mardi, l'Auditeur général a découvert des dizaines de cas d'«abus et d'actes malhonnêtes» au sein de quinze ministères, pour un total de plus de 65 millions de dollars sur l'année budgétaire 2011/12.

Environ 20 millions ont déjà été remboursés. Quelque 150 000 dollars sont dus par les fonctionnaires à leurs ministères. Et 45 millions sont partis dans des prêts à des «entreprises privées», qui ont jusqu'à fin mars 2013 pour rembourser.

«Si les prêts ne peuvent être recouvrés pendant cette période, il y a aura des amendes et des poursuites judiciaires», a précisé le rapport. «Le bureau de l'auditeur général a parlé de ces conclusions avec les responsables des différents départements, et a pris des mesures».

Les sommes «seront remboursées très vite par les ministères respectifs», a ajouté le bureau du président Thein Sein, dans une note jointe au rapport.

Les militaires, qui ont quitté le pouvoir en mars 2011, ont présidé aux destinées du pays pendant un demi-siècle, période pendant laquelle les analystes estiment qu'ils ont constamment pillé les caisses de l'État et envoyé à l'étranger une partie des revenus du gaz et du pétrole.

Une clique d'hommes d'affaires proches de la junte a parallèlement joui d'une emprise énorme sur l'économie locale. Certains d'entre eux ont bénéficié des privatisations organisées en 2010, juste avant les élections.

L'ONG Transparency International avait classé la Birmanie au troisième rang des pays les plus corrompus du monde, l'an dernier.

Le gouvernement de Thein Sein, au pouvoir depuis l'autodissolution de la junte, s'est engagé à combattre la corruption dans le cadre du processus de réformes politiques et économiques.

L'enquête de l'auditeur général signale à cet égard la volonté de surveiller des ministères qui ont longtemps agi comme bon leur semblait en matière financière.

Mais le responsable de publication et le rédacteur en chef d'un hebdomadaire réputé sont poursuivis pour diffamation pour avoir publié des faits de corruption au sein du ministère des Mines, qui ne sont pas mentionnés dans le rapport. Leur procès est en cours.

Lundi, lors d'une visite historique en Birmanie, le président américain Barack Obama avait lancé un appel vibrant pour l'instauration d'une démocratie accomplie, évoquant notamment cette question de la corruption.

«Maintenant que la richesse franchit vos frontières, nous voulons la voir profiter à un plus grand nombre», a-t-il noté. «Le cycle de la croissance ne peut être créé que s'il n'y a pas de corruption. Pour que les investissements soient fructueux, les réformes doivent encourager la transparence budgétaire».

Il a précisé que les entreprises américaines en Birmanie seraient tenues de respecter «des normes élevées d'ouverture et de transparence».