Comme toutes les semaines depuis des mois, des Japonais sont venus par milliers à Tokyo pour dire non au nucléaire. Cette fois en organisant une chaîne humaine autour du Parlement japonais, symboliquement cerné dimanche soir pendant une heure.

Cette manifestation qui s'est terminée à la tombée de la nuit a rassemblé de 10 000 à 20 000 personnes, selon la police, et quelque 200 000 participants d'après les organisateurs. Il s'agissait de la dernière en date pour obtenir l'abandon du nucléaire dans un pays encore traumatisé par la catastrophe de Fukushima en mars 2011.

Selon l'un des organisateurs, Kaori Echigo, des manifestants sont venus de tout le pays. «Il n'y a pas que des gens de Tokyo, il y en a qui viennent en car d'Hokkaido (nord), Nagano (centre) et Osaka», a-t-il déclaré à l'AFP.

En tête de défilé, des militants en combinaison blanche et munis de masques à gaz, la tenue des ouvriers qui décontaminent la centrale accidentée, jouaient des percussions sur des bidons métalliques jaunes marqués du sigle indiquant des substances radioactives: trois triangles noirs reliés par le sommet.

Tout au long du cortège qui avançait lentement dans la fournaise vers le parlement, on pouvait entendre des slogans repris de loin en loin: «Rendez-nous Fukushima!», «Arrêtons l'énergie nucléaire», «Non au redémarrage des réacteurs» ou encore «Protégeons les enfants!».

Beaucoup de gens sont d'ailleurs venus avec leurs enfants dont l'avenir était au coeur du débat. Sur un panneau on voyait ainsi la photo d'un bébé avec pour seule légende: «Plus jamais Fukushima».

«Il faut protéger nos enfants, il faut arrêter le nucléaire peu à peu et le remplacer par des énergies renouvelables», affirme Yoiichi Hashimoto, un employé quadragénaire de Tokyo venu avec son petit garçon.

«Après Fukushima, je suis fermement convaincu que c'est de l'arrogance que de croire que nous pouvons contrôler l'énergie nucléaire», a dit à l'AFP Hiroshi Sakurai, un peintre de 65 ans.

«De plus, on ne sait pas se débarrasser des déchets, il ne suffit pas de tirer la chasse! Et puis tout ce qui touche au nucléaire est toujours antidémocratique», a vitupéré de son côté Naoki Fujita, un architecte d'une cinquantaine d'années.

Une vieille dame a fait sa propre synthèse sur une pancarte: «Sécurité pour 100 000 ans... s'il n'y pas de nucléaire».

À la nuit tombée, les quelques forces de police présentes autour du parlement ont vite été débordées par la foule et les manifestants ont pu encercler comme prévu le bâtiment, équipés de bougies et de petites lampes électriques, au son de tambours assourdissants.

La contestation a nettement grossi depuis la décision en juin du premier ministre, Yoshihiko Noda, de redémarrer deux réacteurs nucléaires sur un parc total de 50.

Depuis quelques mois, les manifestations rassemblent chaque semaine des milliers voire des dizaines de milliers de personnes. Il y a dix jours, de 75 000 à 170 000 antinucléaires s'étaient donné rendez-vous dans un grand parc de la capitale pour la plus grande manifestation jamais organisée depuis la catastrophe.

Et la semaine dernière, un ancien Premier ministre, Yukio Hatoyama, s'était même joint à la manifestation hebdomadaire devant la Primature.

Cette nouvelle manifestation intervient de surcroît quelques jours après la publication d'un nouveau rapport officiel qui a sévèrement mis en cause le gouvernement et la compagnie Tepco, gérante de la centrale, dans l'accident de Fukushima.

«Le problème principal provient du fait que les compagnies d'électricité, dont Tepco, et le gouvernement n'ont pas perçu la réalité du danger, car ils croyaient au mythe de la sécurité nucléaire au nom duquel un accident grave ne peut se produire dans notre pays», ont souligné les membres de la commission d'enquête.

Signe que la mobilisation antinucléaire ne faiblit pas, samedi a été lancé le mouvement politique Greens Japan (Verts Japon) qui compte présenter des candidats aux prochaines élections législatives.