La Chine a garanti la sécurité du militant Chen Guangcheng qui n'a pas demandé l'asile politique à l'ambassade des États-Unis où il s'était réfugié, a annoncé mercredi un responsable américain, peu après l'arrivée à Pékin de la secrétaire d'État Hillary Clinton.

Mais le ministère chinois des Affaires étrangères a exigé des excuses des États-Unis pour avoir accueilli ce militant des droits civiques dans leur mission diplomatique pendant six jours. Un responsable américain, qui a requis l'anonymat, a simplement indiqué que l'incident ne se «reproduirait» pas.

La crise provoquée par l'évasion de l'avocat autodidacte aveugle, le 22 avril, de la résidence très surveillée où il était assigné dans le Shandong (est) depuis 19 mois, a ainsi été opportunément réglée juste avant les discussions, jeudi et vendredi à Pékin, du «dialogue stratégique et économique» entre les deux puissances.

Les discussions sur l'économie et les grands dossiers internationaux de cette rencontre prévue de longue date menaçaient d'être sérieusement compliquées par la présence du dissident chinois dans les locaux de l'ambassade des États-Unis.

Ni Washington ni Pékin n'avaient officiellement reconnu que Chen Guangcheng se trouvait dans la mission diplomatique américaine, comme l'affirmaient depuis plusieurs jours les amis de ce militant pourfendeur des abus de la politique de l'enfant unique. Une affaire très embarrassante pour les deux pays.

Le gouvernement chinois a garanti à Chen Guangcheng un endroit «sûr» pour rester en Chine, a annoncé un responsable américain.

Ce responsable, qui a souhaité l'anonymat, a ajouté que M. Chen n'avait pas demandé à quitter son pays, où il était jusqu'à son évasion soumis, ainsi que ses proches, à de mauvais traitements des autorités locales, selon une vidéo qu'il a adressée la semaine dernière au premier ministre Wen Jiabao.

Auparavant, l'agence officielle Chine nouvelle avait annoncé que Chen avait quitté l'ambassade «de son plein gré», et le responsable américain qu'il allait dans un hôpital et serait «réuni avec sa famille».

Chen a été examiné à l'Hôpital de Chaoyang, au coeur de Pékin, où se trouvait également l'ambassadeur des États-Unis Gary Locke -selon des messages sur weibo, équivalent de Twitter en Chine- et une foule de journalistes.

Hillary Clinton a téléphoné au militant chinois des droits civiques qui lui a dit: «Je voudrais vous embrasser», a également rapporté le responsable américain.

Si la crise autour de Chen semblait avoir trouvé une issue, la Chine a accusé, en termes très durs, les États-Unis.

«Il faut souligner que l'ambassade des États-Unis en Chine a employé des moyens anormaux pour introduire le citoyen chinois Chen Guangcheng dans l'ambassade. La Chine en est très mécontente», a déclaré le porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères, Liu Weimin.

«Cette façon d'agir des États-Unis constitue une ingérence dans les affaires intérieures chinoises inacceptable par la Chine», a-t-il poursuivi.

«La Chine exige des excuses pour cette affaire ainsi qu'une enquête approfondie, des sanctions contre les responsables et la garantie que ce genre d'affaires ne se reproduira pas», a encore dit M. Liu.

Le quotidien officiel Global Times avait été le premier organe de presse chinois mercredi matin à rompre le silence de la presse sur l'affaire: il a estimé dans un éditorial que «les relations sino-américaines ne devraient pas être affectées par l'incident».

Mme Clinton doit participer jeudi et vendredi, en compagnie de son homologue du Trésor Timothy Geithner, à une nouvelle session du «dialogue stratégique et économique».

Cette réunion annuelle -qui se tient alternativement en Chine et aux États-Unis- est traditionnellement l'occasion d'échanges sur les grands dossiers économiques et de politique internationale. Mais aussi sur les droits de l'homme.

Le taux du yuan, la monnaie chinoise que Washington souhaiterait voir s'apprécier bien davantage, est un habituel sujet de contentieux.

Les États-Unis devraient profiter aussi du dialogue pour aborder avec la Chine les grands dossiers internationaux: Syrie, programmes nucléaires iranien et nord-coréen et conflit entre les deux Soudans, sujets sur lequels Pékin est un interlocuteur important.

La Chine a récemment fait des gestes qui ont dû plaire à Washington: elle a réduit ses importations de pétrole iranien, pays sous sanctions américaines, implicitement désapprouvé le lancement d'une fusée par la Corée du Nord et soutenu, enfin, le plan de paix sur la Syrie.