Pyongyang, la capitale nord-coréenne, se fait belle pour célébrer l'arrivée au pouvoir de Kim Jong-Un, âgé de moins de 3O ans, à l'occasion du centième anniversaire dimanche de son grand-père Kim Il-Sung, héros fondateur de la République populaire démocratique de Corée.

Des dizaines de milliers de personnes sont mobilisées jour et nuit depuis près de deux mois, selon des résidents étrangers, pour nettoyer, réparer, repeindre, décorer, en bref redonner un coup de jeune à la ville avant cette grand-messe à laquelle devrait assister une bonne partie des quelque trois millions d'habitants.

Aucun détail n'a été révélé officiellement sur l'organisation des festivités de dimanche, jour anniversaire de Kim Il-sung, héros de la lutte contre l'occupant japonais qui a dirigé la Corée du Nord de 1948 jusqu'à sa mort en 1994.

Mais si l'on en croit les répétitions auxquelles participent des milliers de jeunes garçons et filles sur l'immense place Kim Il-sung, des chants et des danses, ponctués de tableaux vivants et de défilés de chars fleuris, devraient se dérouler jusqu'au soir.

Le point d'orgue de ces festivités devrait être une grande parade militaire, occasion pour le régime de faire une démonstration de force.

Les célébrations seront suivies depuis la tribune par le tout nouveau numéro un nord-coréen, Kim Jong-un, qui devrait d'ici dimanche être nommé secrétaire général du Parti du Travail de Corée (PTC) et président de la Commission nationale de la défense, les deux postes suprêmes détenus par son père Kim Jong-il, décédé en décembre dernier à l'âge de 69 ans après avoir dirigé le pays pendant plus de 17 ans.

Pour l'occasion, la Corée du Nord, pays le plus fermé au monde, a ouvert ses portes à des dizaines de journalistes étrangers, qui doivent être accompagnés dans tous leurs déplacements par des guides du ministère des Affaires étrangères.

Toutefois, des reporters qui ont déjà travaillé en Corée du Nord, avouent être surpris de la relative liberté avec laquelle ils peuvent cette fois-ci prendre des images dans les rues.

Face à une telle affluence, la capitale, traversée par le fleuve Taedong, se doit d'être à son avantage.

Aux fenêtres des immeubles bordant les principales artères de la capitale, des femmes armées de longs manches en bois se contorsionnent pour donner un coup de rouleau de peinture aux façades décrépies.

Sur la chaussée, des ouvrières, casquette sur la tête et bidon de goudron à la main, rebouchent à la va-vite les trous sur le bitume, en évitant les voitures.

Dans les jardins et sur les plate-bandes des avenues, là encore ce sont des femmes, qui par centaines ramassent les détritus et les branches mortes, accroupies sur le sol. Des jardiniers taillent les arbres, d'autres en replantent.

Dimanche, quelque 30.000 gerbes de fleurs baptisées Kimilsunia et Kimjongilia, du nom des deux ex-dirigeants, seront offertes en signe d'hommage par les forces armées, les organes du Parti et les ministères.

Aux carrefours, des faisceaux de drapeaux rouges ont été déployés. La nuit, alors que la plupart des rues sont plongées dans le noir, les contours des bâtiments publics sont illuminés de centaines d'ampoules.

Sur la place Kim Il-sung, qui peut accueillir 100.000 personnes, les portraits de Marx et Lénine qui ornaient, du côté ouest, la façade du ministère du Commerce, ont été décrochés pour laisser la place à deux banderoles rouges à la gloire du jeune dirigeant.

A l'endroit où se trouvait Lénine, une bannière proclame: «Protégeons de nos vies le Comité central dirigé par le grand Kim Jong-un». A la place de Marx, on peut désormais lire «Soutenons vigoureusement le grand leader Kim Jong-un et le Comité central».

Impossible de savoir si les effigies des deux illustres idéologues seront un jour rétablies. La référence au marxisme-léninisme a disparu de la Constitution nord-coréenne depuis 1998.

De l'autre côté de la place, à l'est, un portrait géant de Kim Il-sung orne la façade du ministère de l'Agriculture.

Derrière le bâtiment, plusieurs tours d'habitations d'une cinquantaine d'étages sont sorties de terre en l'espace de quelques mois, symbole de la modernisation et du progrès du pays, malgré l'embargo total imposé par les pays occidentaux.

A une centaine de mètres de l'esplanade, sur la colline Jang Dae-Jae, deux immenses panneaux représentant le président Kim Il-sung et son fils Jong-il, un grand sourire aux lèvres et les yeux rieurs derrière des lunettes, ont été dévoilés lundi en présence de plusieurs milliers d'invités.

A la nuit tombée, des groupes d'étudiants continuaient de défiler pour déposer une fleur artificielle au pied des portraits. Mais en bas de la colline, rares étaient les passants qui jetaient un regard aux deux anciens dirigeants.