Le président birman Thein Sein a reçu samedi dans la capitale Naypyidaw les rebelles de la minorité ethnique des Karens, ont indiqué à l'AFP des hauts responsables, rencontre historique alors que le régime tente de mettre fin à l'un des plus vieux conflits du monde.

Le geste est symboliquement très fort de la part du président, qui veut convaincre son pays et la communauté internationale de la sincérité de ses efforts de paix avec les minorités, en dépit des violents combats qui se poursuivent en État Kachin (extrême-nord).

La réunion a eu lieu samedi matin, selon une source gouvernementale. Un avion spécialement affrété a emmené six leaders de l'Union nationale karen (KNU) à Naypyidaw où ils ont discuté avec le chef de l'État pendant une heure et demie.

«C'était la première rencontre entre le président et les leaders de la KNU», a indiqué de son côté une source proche des négociations, au lendemain de discussions qui ont permis de consolider un cessez-le-feu fragile signé en janvier.

Des délégués des branches armée et politique de la KNU, l'un des groupes rebelles les plus puissants du pays, avaient fait le déplacement vendredi à Rangoun pour consolider le fragile silence des armes dans une guerre civile qui dure depuis 1949.

L'accord en 13 points comprend l'élaboration d'un «code de conduite» des forces armées et le «retour dans leurs maisons des déplacés» avec un règlement équitable des litiges sur la terre et des opérations de déminage.

Des observateurs internationaux devront vérifier le cessez-le-feu, une fois ce dernier certifié par des responsables des deux parties.

Par ailleurs, «le président envisagera la libération de prisonniers sur la base d'une liste» fournie par la KNU. En mars, un membre du comité central de l'organisation avait été amnistié juste après avoir été condamné à 20 ans de prison.

Les autorités considèrent la KNU - dont la direction est installée en Thaïlande - comme illégale. Mais un cessez-le-feu a été signé en janvier, dans le cadre d'une série d'accords signés avec d'autres groupes rebelles.

De nombreuses minorités - un tiers des 60 millions de Birmans - n'ont jamais pacifié leurs rapports avec le pouvoir depuis l'indépendance en 1948 et ont entretenu des foyers de guerre civile.

L'État Karen a été particulièrement exposé pendant des décennies, forçant des dizaines de milliers de personnes à fuir, dont une partie se sont réfugiées en Thaïlande.

Le dossier est considéré comme l'un des plus importants pour la Birmanie, dirigée depuis un an par d'anciens militaires réformateurs suite à la dissolution de la junte.

Cette nouvelle équipe a multiplié les mesures spectaculaires, jusqu'aux élections partielles du 1er avril, qui ont permis à l'ex-prisonnière politique Aung San Suu Kyi d'être élue députée. Les délégués karens doivent la rencontrer dimanche à Rangoun.

La communauté internationale a salué la façon dont se déroulées les partielles, mais la situation préoccupante en État Kachin nourrit les argumentaires des adversaires de la levée des sanctions internationales contre la Birmanie.

De violents combats s'y poursuivent en effet depuis juin, où des organisations de défense des droits de l'homme affirment que les civils sont la cible d'exactions systématiques.

Les élections partielles y ont été annulées dans trois circonscriptions. «Il est facile de déclarer la guerre mais compliqué d'instaurer la paix», relevait vendredi May Oo Mutraw, porte-parole de la KNU.