Une semaine après la collision meurtrière entre deux TGV, les autorités chinoises ont essuyé samedi de nouvelles critiques très vives pour avoir tenté de dissuader des avocats de défendre les victimes de la catastrophe.

Ceci intervient dans un contexte de grande défiance de l'opinion publique, convaincue que le gouvernement a privilégié la reprise du trafic des trains à l'enquête et qu'il fait tout pour étouffer les polémiques sur la qualité du matériel ferroviaire chinois.

Les autorités judiciaires de Wenzhou ont été forcées d'admettre leur «supervision laxiste» et de présenter leurs «profondes excuses» pour un communiqué demandant aux avocats locaux de ne pas représenter les victimes de l'accident.

Mardi dernier, trois jours après le drame qui a fait 40 morts et près de 200 blessés, les cabinets d'avocats de Wenzhou ont reçu ce texte «urgent» leur intimant de ne pas prendre en charge «de façon non autorisée» les familles endeuillées, a rapporté samedi l'agence Chine nouvelle.

Ce communiqué avait été rédigé par l'Association des avocats de Wenzhou, un organisme qui dépend des autorités judiciaires de la ville.

Une fois rendu public sur l'internet, le texte a provoqué des réactions outrées, le gouvernement étant accusé de dissimuler des éléments clés sur les circonstances de la collision.

«Les autorités judiciaires de Wenzhou et l'Association des avocats de Wenzhou ont interdit aux avocats de défendre la cause des victimes, pour qui donc travaillent-ils? J'ai des doutes sur l'indépendance de la Justice en Chine», a confié le cybercitoyen Dianfuzishangwudeguairen sur le service de microblogues de Sina.com.

Depuis la collision sur un viaduc près de Wenzhou, les autorités ont collectionné les impairs. Ceux-ci ont débuté dès les opérations de secours, davantage menées à la tractopelle qu'au stéthoscope.

Des séquences vidéo reprises en boucle et disséquées sur la Toile montrent des pelleteuses en train de pousser les épaves des wagons dans une fosse.

Sur un autre film amateur, les internautes assurent apercevoir un ou deux corps tomber dans le vide, en même temps qu'est provoquée la chute d'un wagon resté suspendu au viaduc. De quoi, là aussi, alimenter la thèse de la précipitation des opérations de désincarcération.

Et, bien après que la phase des secours eut été déclarée terminée, une fillette de deux ans a été retrouvée gravement blessée mais vivante dans l'un des trains.

Même la visite sur place jeudi du Premier ministre a échoué à calmer la grogne: Wen Jiabao a expliqué son déplacement tardif par une maladie qui l'aurait cloué au lit onze jours consécutifs, alors que dans cette même période il a été vu apparemment bien portant en train d'accueillir des délégations étrangères.

Le gouvernement a promis mercredi une enquête «transparente» sur l'accident, officiellement dû à un problème de signalisation.

Le ministère des Chemins de fer s'est lui engagé vendredi soir à tirer des leçons. Évacuer les wagons vers la fosse était nécessaire pour les secours, a-t-il affirmé, en assurant qu'aucun élément de preuve n'avait été enfoui.

Les internautes se sont par ailleurs emparés d'un incident d'aiguillage survenu jeudi soir à l'heure de pointe dans le métro de Shanghai: l'opérateur du réseau a présenté des excuses après qu'une rame eut emprunté une mauvaise voie, là aussi en raison d'un problème de signalisation.

Des experts ont relevé après la catastrophe de Wenzhou le rythme effréné de construction du réseau TGV chinois, devenu en quelques années le plus grand du monde. Il en va de même pour le métro de Shanghai, l'un des systèmes de transport en commun à l'expansion la plus rapide au monde.