Quelque 17 000 détenus birmans devaient sortir de prison mardi, dont d'ex-membres des services de renseignement militaires purgés il y a quelques années, au titre d'une amnistie collective attendue de longue date mais très en deçà des attentes des Occidentaux.

Alors que de nombreuses voix se sont élevées pour réclamer du nouveau régime birman une libération des prisonniers politiques, le gouvernement n'a annoncé lundi soir qu'une réduction collective de peine d'un an.

Les pensionnaires de la célèbre prison d'Insein, à Rangoun, ont ainsi retrouvé leurs proches en milieu de journée après un discours des autorités, selon un photographe de l'AFP. Certaines femmes détenues portaient leurs enfants dans les bras.

«Environ 2.600 détenus vont sortir d'Insein», a indiqué ce responsable birman. «Au total, 17.000 détenus dans tout le pays sont libérés. D'anciens membres des services de renseignement en font partie».

Les renseignements militaires birmans avaient été purgés au milieu des années 2000 par le généralissime Than Shwe, homme fort de la junte aujourd'hui dissoute.

Leur démantèlement avait succédé au limogeage en 2004, puis la condamnation pour corruption, de leur puissant patron et Premier ministre, le général Khin Nyunt, qui est toujours en résidence surveillée.

Mais la sortie d'une poignée de cadres déchus n'a modifié en rien le sort des quelque 2.200 prisonniers politiques qui croupissent dans les geôles du pays.

«Ces actions sont bien loin de la libération complète de tous les prisonniers de conscience, dont la Birmanie a tant besoin», a estimé Benjamin Zawacki, un porte-parole d'Amnesty International.

La semaine dernière, Vijay Nambiar, chef de cabinet du secrétaire général des Nations unies, s'était rendu en Birmanie pour la première fois depuis l'avènement du régime «civil» fin mars.

Il avait noté des «signes encourageants» mais émis le souhait de voir des gestes concrets, notamment en ce qui concerne les opposants emprisonnés. Une demande restée sans effet, confirmant que le régime reste largement insensible aux pressions étrangères.

L'organisation Human Rights Watch (HRW) a estimé que cette amnistie constituait «une gifle» pour le responsable de l'ONU, décrivant «une réponse pathétique aux appels internationaux».

Lundi soir, le président Barack Obama a annoncé qu'il reconduisait les sanctions qui devaient expirer ce mois-ci. Utilisant un langage pratiquement identique aux années précédentes, il a critiqué notamment «la répression à grande échelle de l'opposition démocratique».

«Nous réitérons notre appel pour que tous les prisonniers politiques soient libérés immédiatement», a affirmé le porte-parole du Département d'État, Mark Toner.

Un haut responsable américain, Joseph Yun, est attendu mercredi en Birmanie pour des entretiens, a indiqué à l'AFP une source birmane.

Washington avait décidé fin 2009 d'entamer un dialogue avec la junte tout en maintenant les sanctions. L'administration américaine s'est déclarée depuis déçue par ce dialogue, rejetant l'appel de certains pays asiatiques d'alléger les sanctions après les élections contestées de novembre dernier.

Le seul dissident de poids libéré ces derniers mois est la plus célèbre d'entre eux, l'opposante Aung San Suu Kyi, dont la résidence surveillée avait été levée en novembre, juste après ces élections. Elle juge la libération des opposants nécessaire à toute levée des sanctions.

Les récentes réformes politiques dans le pays ont été accueillies avec beaucoup de scepticisme. Opposants et chancelleries occidentales ont notamment dénoncé le maintien au pouvoir des mêmes hommes et le contrôle de l'appareil civil par une armée surpuissante.