Il est difficile de trouver un fil conducteur dans la vie de Lee Myung-bak, président sud-coréen engagé dans un bras de fer avec la famille Kim aux commandes de la Corée du Nord.

Il a été arrêté par la dictature sud-coréenne lors d'une manifestation antijaponaise dans les années 60. Devenu le grand patron de Hyundai Construction, il a ensuite fortement contribué à faire de Séoul, capitale sud-coréenne, une mer de béton.

Puis, en tant que maire de la capitale coréenne, il a démoli une autoroute au centre-ville pour restaurer un canal bucolique.

Sa présidence, depuis 2008, a été marquée par l'arrêt de l'aide humanitaire à la Corée du Nord, mais aussi par des réponses prudentes aux provocations de Pyongyang.

«Lee Myung-bak a démantelé la politique du «rayon de soleil» de ses prédécesseurs, mais il n'est pas particulièrement belliqueux envers le Nord», explique Bruce Bennett, spécialiste de l'Asie du Nord-Est au groupe de réflexion californien Rand.

«Simplement, il pense qu'aider le régime ne diminuera pas les tensions tant que le Nord n'aura pas renoncé à l'arme nucléaire. C'est un homme d'affaires pragmatique: il voit bien que l'aide humanitaire est en bonne partie détournée pour nourrir l'armée, ou même pour fabriquer des explosifs à partir de fertilisants. Ça ne l'empêche pas d'envoyer ponctuellement des vivres quand des catastrophes naturelles frappent le Nord. Il n'a pas non plus réduit le financement de la zone de libre-échange de Kaesong, en Corée du Nord, où sont implantées des entreprises sud-coréennes, même si le Nord a fermé les frontières à quelques reprises.»

Bulldozer

Le président Lee a notamment promis d'aider la Corée du Nord à hausser de 900$US à 3000$US son PNB par habitant, en échange d'une garantie sur les armes nucléaires. Son insistance sur le développement économique, à peine affectée par les conflits armés qui ont ponctué les deux premières années de son mandat, lui a valu le surnom de Bulldozer, qui rappelle à la fois sa période chez Hyundai Construction et sa volonté de mettre en oeuvre ses projets.

Après son arrestation dans les années 60, suivie d'une condamnation qui a compliqué sa quête d'emploi, il a écrit directement au président d'alors pour obtenir un pardon - avec succès. Son pragmatisme est parfois attribué par les commentateurs à son christianisme et à ses origines humbles - il est né au Japon durant la guerre dans un camp de travail forcé - qui lui permettent de transcender les classes sociales.

«Lee sait que ses appuis politiques sont fragiles, dit M. Bennett. Il a perdu des élections administratives l'été dernier parce qu'il s'était servi du torpillage de la vedette Cheonan à des fins politiques. Il subsiste dans le pays un courant antiaméricain important, particulièrement dans les médias, et l'idée que les cousins du Nord ne sont pas foncièrement dangereux, seulement turbulents. Il a dû son élection à la volonté de la Chine de légitimer sa domination éventuelle de la péninsule coréenne après qu'un rapport d'archéologues eut affirmé que les dynasties coréennes des deux derniers millénaires étaient en réalité chinoises. Comme dit le proverbe, la Corée est comme une crevette coincée entre deux baleines, la Chine et le Japon.»